samedi, mars 10, 2007
Découverte de "la fille de Lucy"
Coup de théâtre dans le monde de la paléo-anthropologie, provoqué par un article de la revue Nature.
Le squelette d'une enfant d'une espèce proche de l'Homme a été découvert à Dikika, en Ethiopie. Il s'agit d'un spécimen d' australopithèque afarensis, vieux de 3.3 millions d'années.
Déjà, en 1974, un squelette adulte avait été découvert et baptisé Lucy. En effet, Lucy a été découverte par les membres de l'International Afar Research Expedition, un groupe d’une trentaine de chercheurs américains, français et éthiopiens au nombre desquels figuraient Yves Coppens, Donald Johanson et Maurice Taieb.
La découverte de Lucy fut très importante pour l’étude des Australopithèques : il s’agit du premier fossile relativement complet qui ait été découvert pour une période aussi ancienne. Les restes de Lucy sont constitués de fragments de 52 ossements dont une mandibule, des éléments du crâne mais surtout des éléments post-crâniens dont une partie du bassin et du fémur.
Découverte dans des terrains datés de 3,18 millions d'années, Lucy a longtemps été considérée comme la représentante d’une espèce à l’origine de la lignée humaine. Des découvertes plus récentes ont remis en cause cette hypothèse : Lucy serait une cousine éloignée, plutôt qu’une ancêtre du genre Homo.
La fille de Lucy
Cette fois, les ossements, qui sont presque au complet, sont ceux d'une fillette de trois ans. Le squelette, pris dans un bloc de grès, avait été identifié en 2000. Cinq années de travail minutieux auront été nécessaires pour le dégager.
Un fossile unique
Les fouilles ont été dirigées par Zeresenay Alemseged, de l'Institut Max Planck d'anthropologie de Leipzig, en Allemagne. Son point de vue sur l'importance de la découverte : "Ce fossile nous révèle de nombreux secrets au sujet de l'australopithèque afarensis et des premiers hominidés: jusqu'ici, nous n'avions pas de fossiles aussi complets de ce genre".
Les chercheurs ont trouvé le crâne entier, ainsi que le tronc, et une grande partie des membres supérieurs et inférieurs. Une tomographie (aux rayons X) révèle la présence de dents encore logées dans la mâchoire, qui n'ont pas émergé. Les scientifiques pensent donc que la fillette avait environ trois ans au moment de sa mort.
L'enfant a été prénommée Selam.
Ce qui est remarquable, c'est que certains os délicats, qui généralement disparaissent quand un squelette se fossilise, sont encore présents. C'est le cas de l'os hyoïde (ou lingual). Or ce dernier donne des indications précieuses sur les cordes vocales, et sur le genre de sons que cet australopithèque pouvait produire.
Un rôle charnière
Dans une interview accordée à Pallab Ghosh, rédacteur scientifique de la BBC, Zeresenay Alemseged estime que l'australopithèque afarensis marquait sans doute la transition entre les pré-hominidés qui existaient il y a 4 millions d'années et ceux qui sont apparus par la suite.
Selon lui, "l'espèce tenait à la fois du singe et de l'homme, et joue donc un rôle charnière si on veut savoir qui nous sommes, et d'où nous venons".
L' australopithèque afarensis avait des dents rudimentaires et un cerveau de petite taille. Mais il se tenait debout, et marchait.
Les chercheurs ne savent pas, en revanche, si la fillette était aussi capable de grimper aux arbres comme un singe.
La question fait l'objet d'un débat passionné.
Pour cela, l'espèce aurait eu besoin de certaines caractéristiques anatomiques.
De longs bras, par exemple: ceux de l'espèce à laquelle appartenait "Lucy", lorsqu'ils étaient au repos et pendaient, atteignaient presque les genoux. Elle avait aussi des omoplates semblables à celles des gorilles, ce qui laisse penser que Lucy et ses congénères pouvaient se déplacer en se balançant de branche en branche.
Quant au cerveau de la fillette trouvée à Dikika, il avait un volume d'environ 330 cm3, ce qui est proche de celui d'un chimpanzé du même âge.
Ce volume représente 63 à 80 % de celui d'un cerveau d' australopithèque afarensis adulte, soit un volume inférieur à celui d'un chimpanzé adulte, qui atteint déjà 90% de son maximum lorsque le singe a trois ans. Croissance assez lente, donc, pour la fillette de Dikika, ce qui la rapproche de l'espèce humaine.
L'homme se développe en effet plus lentement que les singes, son enfance est prolongée, sans doute pour permettre le développement de ses fonctions supérieures.
Fred Spoor, de l'université de Londres, estime que la découverte donnera aux paléontologues "des indications détaillées sur la croissance de nos lointains ancêtres, et sur leur comportement, à un moment de notre évolution où ils ressemblaient bien plus à des chimpanzés bipèdes qu'à des êtres humains".
Commentaires
J'ai lu cet article avec un très grand intérêt, réalisant que nous avons oublié combien nous sommes liés à toutes les formes de vie apparues sur cette planète. Maintenant, nous commençons à entrevoir les conséquences des modifications climatiques que nous introduisons dans notre environnement terrestre. C'est la survie de notre espèce et de bien d'autres qui est remise en question et ce, à l'intérieur de quelques centaines d'années, et non pas des millions d'années. Un constat dramatique!
RD
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