mardi, février 28, 2012

 

Aide médicale pour mourir: une ouverture balisée


Articles de Jean-Marc Salvet, Le Soleil, 21 février 2012

La Commission sur le droit de mourir dans la dignité devrait proposer une aide médicale pour mourir et refuser d'intenter des poursuites contre les personnes qui en aident une autre à finir ses jours.

 Le Québec devrait, dans des circonstances exceptionnelles et bien circonscrites, offrir une aide médicale pour mourir.

Il devrait refuser d'intenter des poursuites contre les personnes qui en aident une autre à mourir, même si le Code criminel canadien prévoit que l'euthanasie et le suicide assisté sont des actes criminels.

Voilà l'une des recommandations que présenteront les députés québécois membres de la Commission spéciale sur le droit de mourir dans la dignité, selon ce qui circule sur la colline parlementaire. Elle ne surprendra pas ceux qui ont suivi leurs travaux.

C'est finalement à la mi-mars que ces élus dévoileront publiquement leurs conclusions et recommandations aux Québécois, a-t-on aussi dit au Soleil.

La Commission a sillonné le Québec. Elle a été présentée comme un modèle de travail parlementaire non partisan. Ses travaux se sont étirés sur deux ans.

 D'entrée de jeu, au printemps 2010, le libéral Geoffrey Kelley et la péquiste Véronique Hivon avaient rappelé qu'en vertu du Code criminel canadien, il appartient aux provinces de décider si elles engagent ou non des poursuites. C'est à partir de cette prérogative que l'Assemblée nationale pourrait s'inspirer de la Colombie-Britannique et décider de ne pas poursuivre systématiquement une personne - un médecin - aidant «par compassion» un malade à mourir.

Si cette recommandation ne surprendrait guère, c'est qu'elle était exposée - en guise de simple exemple, à ce moment-là - dans le document de consultation présenté en mai 2010 par les députés Kelley et Hivon.

On y laissait entendre que si la Colombie-Britannique pouvait éventuellement inspirer le Québec, c'est qu'en 1993, dans la foulée de l'affaire Sue Rodriguez, le procureur général de cette province avait précisé des lignes directrices balisant ce délicat terrain. Pour que Victoria engage une action en justice, il faut, entre autres, que la déclaration de culpabilité soit probable et que la poursuite soit dictée par l'intérêt public.

Soins palliatifs

Dans le rapport qui sera rendu public le mois prochain, plusieurs recommandations porteront sur la nécessité de bonifier les ressources dans les centres d'hébergement et de soins de longue durée, ainsi que dans les services de soins palliatifs.

C'est d'ailleurs sur ce volet du dossier que le rapport devrait mettre l'accent. Les soins palliatifs sont une nécessité de l'époque, dit-on.

La députée-présidente de la Commission parlementaire sur la question de mourir dans la dignité, Maryse Gaudreault, décline toute demande d'entrevue jusqu'au dévoilement du rapport.

 Aide médicale pour mourir: «ouverture» du ministre Bolduc

Le ministre Yves Bolduc croit que le dépôt du rapport de la Commission spéciale sur la question de mourir dans la dignité marquera le début d'une grande discussion de société.

Le ministre québécois de la Santé, Yves Bolduc, se dit «ouvert» à l'idée de mettre en place une aide médicale pour mourir - dans des circonstances exceptionnelles et bien circonscrites. Mais, très prudent, et sachant à quel point ce dossier est délicat et la question hypersensible, il cherchera à mesurer son acceptabilité sociale avant d'aller de l'avant.

Le Soleil a interrogé Yves Bolduc, mercredi (22 février), sur certaines des recommandations que présenteront sous peu les députés membres de la Commission spéciale sur la question de mourir dans la dignité. Elles seront officiellement dévoilées à la mi-mars.

«Je vais écouter, mais s'il y en a un qui a une ouverture d'esprit, c'est moi. Vous pouvez le noter», a-t-il certifié. Il parlait tant des soins palliatifs que d'une aide médicale pour mourir.

Le Soleil indiquait mardi que les membres de la Commission recommanderaient que le Québec s'abstienne, dans des circonstances particulières et bien balisées, d'intenter des poursuites devant les tribunaux contre une personne - un médecin - qui aiderait quelqu'un à mourir. Et ce, même si le Code criminel canadien prévoit que l'euthanasie et le suicide assisté sont des actes criminels. C'est que les provinces ont une marge de manoeuvre. Il leur appartient de décider si elles engagent ou non des poursuites.

 C'est à partir de cette prérogative que la Colombie-Britannique a choisi de ne pas poursuivre systématiquement un médecin aidant «par compassion» un malade à mourir.

Yves Bolduc confie n'avoir aucune «fermeture de principe» sur cette question. Le dépôt du rapport marquera «le début d'une grande discussion de société», dit-il.

Le ministre ne veut pas bousculer la société québécoise, mais il croit qu'elle est prête à faire un pas. «Il ne faut pas aller plus vite que la société, mais elle est rendue à un certain niveau.»

Aujourd'hui, pour que la Colombie-Britannique engage une action en justice, il faut, entre autres, que la déclaration de culpabilité soit probable et que la poursuite soit dictée par l'intérêt public.

Soins palliatifs

L'autre recommandation phare de la Commission spéciale sur la question de mourir dans la dignité portera sur la nécessité de bonifier les ressources dans les centres d'hébergement et de soins de longue durée, ainsi que dans les services de soins palliatifs.

«Sur les soins palliatifs, le Québec avance déjà, a affirmé le ministre Bolduc lors de cet entretien. On va atteindre notre objectif d'un lit par 10 000 personnes.» Sur ce volet du dossier, tout le monde s'entendrait facilement. Le problème en est un de moyens financiers.

 La Commission a sillonné le Québec pendant de nombreux mois. Ses travaux se sont étirés sur deux ans.

RD

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Bilan des CHSLD québécois : encore beaucoup de mauvais soins


Article de Rémi Nadeau, Journal de Québec, 27 février 2012

Bien que des inspections ont révélé de graves lacunes dans plusieurs établissement, certains CHSLD continuent de les tolérer.


Huit ans après l’implantation d’un processus gouvernemental d’inspection, des CHSLD n’offrent toujours pas de services décents aux aînés qui leur sont confiés.

Encore pire, certains établissements continuent de tolérer de graves lacunes qui avaient été dénoncées par les inspecteurs du ministère de la Santé lors de précédentes visites de leurs installations. C’est le triste constat qui s’impose après un survol des rapports de visite des centres d’hébergement et de soins de longue durée de 2010 et 2011.

Par exemple, au Pavillon Alfred-Desrochers, à Montréal, le rapport fait état de « repas désorganisés », de « manque de respect envers les résidents », de « mépris » et « d’odeurs désagréables et persistantes ».

À la résidence Rive-Soleil, à Montréal, plusieurs chambres ne sont pas munies de toilette et les résidents affirment que « leur besoin d’élimination est brimé », alors qu’au Centre d’hébergement de Donnacona, « l’intimité des résidents n’est pas respectée » et des résidents « ont froid lors des soins d’hygiène ».

Ministre déçue

La ministre déléguée aux Services sociaux, Dominique Viens, juge inacceptables ces situations relevées par les inspecteurs, qui informent pourtant les centres de leur visite 24 heures à l’avance.
« Ce sont des comportements exécrables. Ça devrait être impeccable, point à la ligne, surtout lorsqu’on donne des soins à une clientèle si vulnérable », a commenté la ministre responsable.

Sans pouvoir l’expliquer, elle trouve « désolant » que des établissements n’apportent pas rapidement les correctifs nécessaires à la suite de rapports d’inspection défavorables.

« C’est dans la gouverne locale, au niveau des centres de santé et de services sociaux, et en dernier recours, à l’Agence régionale de santé. C’est là qu’il faut qu’il se passe quelque chose », a clamé Mme Viens, plaidant pour la responsabilisation des dirigeants régionaux.

« C’est à l’Agence de s’assurer que les correctifs soient apportés. Moi, je ne m’attends pas à moins que cela. Ça va tellement de soi que des comportements inacceptables ne devraient pas être tolérés », a ajouté la ministre.

Inspections

L’équipe des visites d’appréciation du ministère de la Santé est composée de seulement deux inspecteurs.

Toutefois, le nombre d’inspections a augmenté significativement en 2010-2011 par rapport à l’année précédente, passant de 54 à 88.

Malgré cet effort, les CHSLD de plusieurs régions du Québec n’ont pas été visités depuis 2008.

Le Centre de santé de Chibougamau, qui commandait pourtant des corrections « immédiates » parce qu’il entassait quatre résidents dans des chambres aux conditions d’hygiène « laissant à désirer », n’a pas été inspecté depuis le 7 avril 2004.

Consciente de l’existence de cas problèmes, Dominique Viens juge quand même que la plupart des établissements dispensent des soins de qualité et que son ministère a pris les moyens nécessaires pour éliminer les histoires d’horreur. « Nous avons augmenté les visites et nous faisons des gestes qui sont sévères pour assurer la sécurité des aînés », a-t-elle conclu.

LA FIN DES BILANS DE VISITE

Alors que le réseau présente des lacunes évidentes, le ministère de la Santé a choisi de ne plus produire de bilan national de ses visites d’inspection. Après des demandes répétées du Protecteur du citoyen, le ministère avait discrètement mis en ligne son premier rapport national couvrant la période 2004-2007.

On apprenait que plus de 50 % des 137 établissements visités présentaient une déficience dans l’accompagnement des activités d’élimination et que 47 % avaient « une grande part d’éléments à améliorer » quant à la qualité de la nourriture.

Or, plutôt que de produire un rapport du même type pour la période 2007-2010, le ministère a préféré préparer un bilan des mesures correctrices apportées, qui devrait être publié au cours des prochaines semaines.

« Honnêtement, je trouve ça pas mal plus pertinent », a défendu la ministre déléguée aux Services sociaux, Dominique Viens.

Selon elle, la situation a suffisamment évolué depuis l’implantation des visites d’appréciation, en 2003-2004, pour modifier l’approche de veille nationale. « Au début, peut-être qu’effectivement, c’était important d’avoir un bilan sur les constats et les observations faites, mais maintenant, nous cherchons plutôt à voir si les recommandations sont suivies », a-t-elle justifié.

Fermer les yeux

Au Parti québécois, la députée Carole Poirier accuse le gouvernement de fermer sciemment les yeux sur l’état du réseau des CHSLD, en abandonnant la publication d’un bilan des inspections. « Nous n’aurons plus de portrait global. C’est inquiétant, et tout ça, parce qu’ils ont peur des critiques », a commenté la porte-parole de l’opposition officielle pour les aînés.

Selon elle, Québec fait preuve d’un manque flagrant de transparence. « Elle est où la reddition de comptes d’un système public que nous payons tous. Est-ce qu’on peut savoir s’il répond aux besoins? » a martelé la députée Poirier.

Le député de la Coalition Avenir Québec Janvier Grondin a aussi qualifié d’inquiétante la décision du gouvernement.

 COMMENTAIRE DE PHILOMAGE

On peut se poser la question suivante : notre belle société québécoise possède-elle une culture générale qui respecte ses aînés, particulièrement ceux qui sont les plus démunis. 

Il est évident que les soins demandés par les personnes âgées en perte d'autonomie, souvent quasi totale, sont exigeants et même très difficiles à donner par le commun des mortels, et même pour du personnel très bien entraîné. Alors, il y a lieu de se demander quels incitatifs ou compensations ou récompenses ou motivations doit-on donner au personnel engagé quotidiennement dans ces tâches que l'on peut considérer comme extrêmes? La réponse est à la fois simple et compliquée : ce n'est pas tout le monde qui peut accomplir, jour après jour ces tâches et ceux qui le font doivent posséder des qualités humaines hors pair, que tout le monde ne peut avoir. 

La qualité des soins est fortement liée au choix du personnel qualifié et à une formation exemplaire, qui permet de relever ces défis permanents. Mettre en place au quotidien des accommodements raisonnables semble faire partie des solutions acceptables ou positives.

Personnellement, je n'ai pas de réponse toute faite d'avance face aux drames humains des personnes âgées, en perte d'autonomie, partielle ou totale. Cela ressemble beaucoup à du cas par cas, avec des balises pour ne pas tomber dans les extrêmes, lorsqu'il est question de soins personnels, d'alimentation, d'attention, de divertissements, etc.

RD

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Des CHSLD de rêve, ça existe au Québec ?

Madeleine St-Cyr, 97 ans, adore lire. Mais comme sa vue n'est plus ce qu'elle était, elle reçoit chaque semaine la visite d'une bénévole qui lui fait la lecture au Centre d'hébergement Argyll à Sherbrooke.

Article d'Ariane Lacoursière, La Presse, 28 janvier 2012

Aînés maltraités. Établissements malpropres. Résidents souffrant de malnutrition... Les drames se déroulant dans les centres d'hébergement pour personnes âgées du Québec font très souvent les manchettes. Ces événements font oublier que chaque jour, des centaines de bons coups sont réalisés dans ces établissements. Au cours des dernières semaines, La Presse a visité trois centres d'hébergement public pour aînés qui se démarquent par la qualité des soins offerts.

1. Centre d'hébergement Argyll (Sherbrooke)

Visiter un proche qui perd son autonomie, qui a toujours le regard vide et qui ne nous reconnaît plus peut être troublant. Pour éviter ces malaises, plusieurs personnes délaissent les membres de leurs familles hébergés en institution. Mais au centre d'hébergement Argyll à Sherbrooke, l'ambiance est si agréable que même de purs étrangers viennent passer des soirées avec les résidents!

Grâce à une programmation riche en activités, les 260 personnes âgées qui habitent au centre d'hébergement Argyll, dont 80% souffrent de troubles cognitifs, ne s'ennuient jamais. Tous les jeudis, une activité «pub» est tenue. Pendant une heure trente, des musiciens viennent jouer dans une grande salle où les résidents sont invités à prendre une bière, un verre de vin ou une boisson gazeuse.

«On filme les soirées et c'est diffusé en temps réel dans les chambres, pour ceux qui ne peuvent se déplacer, explique la récréologue Annie Masson. Des gens du quartier, qui n'ont même pas de famille ici, viennent à ces soirées tellement c'est agréable!»

Chaque semaine, les familles sont invitées à participer aux différentes activités. «On va au musée, au restaurant, on va magasiner. À Noël, on va voir les décorations», énumère Mme Masson.

Des formations sont aussi offertes aux familles pour les aider à rendre leurs visites plus agréables. «Au lieu de passer son temps à demander à sa mère qui souffre d'alzheimer si elle se souvient de nous, on est mieux de faire une activité qu'elle va aimer. Si elle aimait le shortcake aux fraises, on peut apporter des fraises et les équeuter avec elle. C'est le genre de trucs qu'on donne», illustre Annie-Andrée Émond, conseillère en communication au centre de santé et de services sociaux (CSSS) de l'Institut universitaire de gériatrie de Sherbrooke, dont fait partie le centre d'hébergement Argyll.

André Desharnais habite au centre d'hébergement Argyll depuis deux ans. Il y est entré à la suite d'un infarctus. Âgé de seulement 65 ans, il se décrit lui-même comme «le bébé de la place». Président du comité des résidents, il s'occupe aussi du journal local. «Je crée des mots croisés», dit-il. S'ennuie-t-il? «J'ai pas le temps!»

Madeleine St-Cyr, 97 ans, habite elle aussi au centre d'hébergement Argyll depuis deux ans. Chaque semaine, la bénévole Johanne Pellerin vient lui faire la lecture. «Mes auteurs préférés sont Gabrielle Roy, Félix Leclerc et Gilles Vigneault. J'aime aussi les biographies», énumère Mme St-Cyr, qui est parfaitement lucide, mais qui a perdu la vue. Vêtue d'une robe mauve, ses beaux cheveux blancs bien coiffés, Mme St-Cyr paraît parfaitement heureuse. «Ce que j'aime ici? Tout! lance-t-elle. Il y a plein d'activités. Ils m'ont même emmenée voir ma soeur qui a 100 ans à Saint-Jean-sur-Richelieu!»

Ce petit voyage a été rendu possible par le projet «Rêves d'aînés» de la Fondation Vitae du CSSS. «On réalise le rêve des résidents. Souvent, ça ne coûte pas grand-chose. Prenez Mme St-Cyr. On l'a emmenée voir sa soeur qui habite dans un centre d'hébergement de Saint-Jean. Elle a dormi là et elle est revenue le lendemain. Elle était tellement contente!», note Mme Émond.

La Fondation Armand Bombardier a aussi permis la construction d'un chalet qui accueille les résidents pour différentes activités. «Des fois, ce n'est pas compliqué. On emmène les résidents y prendre un chocolat chaud. Mais on a aussi organisé une soirée fondue chinoise qui a été un franc succès», note Mme Émond.

Toutes les activités offertes au centre d'hébergement Argyll sont possibles grâce à l'abondance de bénévoles qui caractérise la région de Sherbrooke. «Sans eux, on n'y arriverait pas, croit Mme Masson. C'est réellement une grande richesse.»

2. CHSLD Yvon-Brunet

Un homme est attablé devant une bière, qu'il sirote doucement. Au mur, une pancarte vante les mérites de la bière Labatt 50. Une télévision diffuse un match de curling. Des bols de chips traînent sur les tables. L'espace d'un instant, on se croirait dans une taverne. Mais on se trouve plutôt au bar de la «rue Principale» du centre d'hébergement Yvon-Brunet à Montréal. Un endroit grouillant de vie qui fait oublier que les 185 résidents de cet établissement sont en lourde perte d'autonomie.

Réalisant que sa clientèle ne pouvait plus sortir facilement, le centre d'hébergement Yvon-Brunet a décidé de «faire venir la rue» à l'intérieur. Au sous-sol de l'établissement, une foule de commerces sont accessibles, dont un dépanneur, un bar, une bibliothèque, une boulangerie et un salon de coiffure.
«Quand on fait des activités comme un bingo, le prix à gagner est souvent de l'argent. Les gagnants dépensent leurs sous dans la «rue Principale». Ça les sort de leur chambre», explique Éric Gagné, conseiller aux activités au centre d'hébergement Yvon-Brunet.

Le jour de notre passage par un mardi après-midi enneigé de janvier, le couloir de la «rue Principale» était bondé. Les gens y circulaient en fauteuils roulants et en déambulateur dans une joyeuse cacophonie.

Dans une pièce isolée, des bénévoles tenaient, comme chaque mois, un «spa santé». À l'intérieur du local à la lumière tamisée, des résidentes se faisaient masser, maquiller ou profitaient d'une manucure.
Le coeur de la «rue Principale» reste le dépanneur, devant lequel sont installées plusieurs tables souvent occupées. Le jour de notre passage, l'activité «taverne» avait lieu. Une quinzaine d'hommes sirotaient gratuitement une bière en mangeant des saucisses entourées de pâte et en regardant la télévision. Trois femmes bavardaient en jouant une partie de YUM.

 Résident, mais aussi bénévole, M. Sylvestre se promenait en offrant des chips. L'homme, qui est incapable de parler, sait se faire comprendre par ses pairs. «Il aime s'occuper du bar et servir. Il se rendre utile», note le responsable du service à la clientèle au centre d'hébergement Yvon-Brunet, Benoît Martimbault.

En plus des nombreux commerces de la «rue Principale», une garderie en milieu familial de six enfants loge au centre d'hébergement Yvon-Brunet. «Les enfants mangent avec les aînés. Ils vont parfois leur chanter des chansons. Ça fait plaisir aux résidents de côtoyer des enfants, sans avoir à s'en occuper», dit Daniel Chartrand, directeur de l'hébergement du CSSS Verdun.

Dans un coin de la «rue Principale», on trouve une dizaine de meubles anciens restaurés par un résident. À son arrivée au centre d'hébergement, cet homme s'isolait. On lui a aménagé un atelier et confié des mandats de restauration de meubles. Depuis, le résident est totalement épanoui. Il a relancé ses affaires et vend quelques meubles aux familles des résidents.

 C'est le centre Yvon-Brunet qui a créé, en 1981, le concept de «milieu de vie», qui a amené les centres d'hébergement du Québec à cesser de ressembler à des hôpitaux. Depuis, cet établissement fait figure de pionnier dans le domaine. Tout y est possible. «La vieillesse n'est pas une maladie. On a tout fait pour développer un établissement comme à la maison. Il n'y a pas de poste d'infirmières. Pas d'uniformes. On essaie tous les jours de repousser les limites de l'institution», dit M. Chartrand. «Dans le fond, il faut se dire qu'on est locataires ici. Ce sont les résidents qui sont chez eux», résume M. Martimbault.

3. Les p'tites maisons (Saint-Eugène)


Dans le milieu de l'hébergement pour aînés au Québec, tout le monde a déjà entendu parler des «petites maisons de Montmagny». Ce centre d'hébergement nouveau genre a ouvert ses portes en 2008 et fait aujourd'hui l'envie de la province entière, voire d'autres pays.

Quand est venu le temps de rénover deux centres d'hébergement sur son territoire, le centre de santé et de services sociaux (CSSS) de Montmagny-L'Islet a décidé de faire les choses autrement. Au lieu de reconstruire des établissements de style hospitalier, il s'est inspiré des pays scandinaves pour créer des centres à dimension humaine. Résultat: quatre petites maisons pouvant héberger chacune seize résidents ont vu le jour dans les villages de Saint-Eugène et de Sainte-Perpétue.

 Chacun de ces bâtiments est divisé en deux unités de huit résidents, qui donnent l'impression d'être «à la maison». Lors de notre passage au centre d'hébergement de Saint-Eugène, la tranquillité des lieux était palpable. Dans un salon à l'ambiance feutrée, une dame lourdement atteinte de l'alzheimer tenait tendrement une peluche en regardant le foyer, une douce musique de Noël jouant en trame de fond. Une intervenante est passée et lui a caressé les cheveux. La dame a fermé les yeux, l'air serein.

 Dans la salle à manger, deux résidentes discutaient dans un langage incompréhensible. Atteintes de troubles cognitifs, ces dames se sont liées d'amitié depuis leur arrivée. Elles sont les seules à se comprendre, explique une préposée. Ce jour-là, elles s'adonnaient à une activité particulière. Pendant que l'une d'elles défaisait une pelote de laine, l'autre la refaisait, sous le regard attendri de l'employée.

 Un seul préposé aux bénéficiaires s'occupe de huit résidents au centre d'hébergement de Saint-Eugène. Ce petit ratio permet l'adoption d'horaires flexibles. «On va en fonction des besoins des résidents. Si quelqu'un préfère prendre sa douche le soir, on fait ça. Il n'y a pas de déjeuner à 7h30. Les gens mangent quand ils se réveillent», explique Mireille Gaudreault, agente de communication au CSSS de Montmagny-L'Islet.

Personnel multitâche

Pour permettre ces services adaptés, le personnel a dû accepter des changements de tâches majeurs. Par exemple, un préposé aux bénéficiaires peut être appelé à préparer un repas ou à faire du ménage. Des tâches qu'ils ne réalisent pas en institution.

«Ces changements n'ont pas été faciles à faire passer. Les préposés ne sont pas formés à l'école pour travailler dans des milieux comme ici. Mais ils se sont bien adaptés et plusieurs savourent maintenant leur autonomie», explique Ninon Bourque, conseillère en milieu de vie au CSSS.

En plus d'offrir des soins personnalisés, les petites maisons sont conçues pour offrir un milieu de vie agréable. Il y a de vastes fenêtres partout. Dans les chambres des patients plus autonomes, une porte vitrée donne directement accès à l'extérieur. L'établissement a été construit de plain-pied. Il n'y a pas d'escalier. Pas d'ascenseur. «Il y a moins de perte de temps pour le personnel. Pour les mesures d'urgence comme les évacuations, c'est un avantage majeur», note la coordonnatrice des maisons Saint-Eugène et Sainte-Perpétue, Valérie Dion.

Ce mode de conception a été économique: la construction des 64 lits a coûté 8,6 millions en 2008 alors que les coûts projetés pour un établissement conventionnel étaient de 12 millions. Les cuisines sont au coeur de chacune des maisons. Le jour de notre visite, une employée préparait un «pouding grand-mère» derrière un comptoir devant lequel les résidents peuvent s'asseoir pour la regarder travailler. Un chat est aussi présent en permanence dans les maisons. Tous ces détails permettent aux petites maisons d'offrir un environnement paisible aux résidents, ce qui a des effets positifs notoires, selon Mme Bourque. «Ils sont plus calmes. Il y a beaucoup moins de gestion de comportements à faire. Les gens sont sereins», dit-elle.

 COMMENTAIRE DE PHILOMAGE

Des exemples intéressants. Mais, comment ça se passe ailleurs?

RD

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mercredi, février 22, 2012

 

La retraite à temps partiel pour la moitié des Canadiens


Le visage de la retraite au Canada est en train de changer.  

« la retraite à temps partiel »
 
Source : La Presse canadienne, Lesaffaires.com, 22 fév. 2012

Une étude publiée mercredi par la Financière Sun Life indique qu'à peine trois Canadiens sur dix prévoient prendre définitivement leur retraite à l'âge de 66 ans. Autre tendance à la hausse : près de la moitié des Canadiens (48 pour cent) prévoient prendre une retraite progressive en travaillant à temps partiel ou à la pige.

L'étude signale que bon nombre de Canadiens sont de plus en plus préoccupés par la situation économique actuelle et se demandent s'ils pourront épargner suffisamment d'argent.

Isabelle Hudon, présidente de la Financière Sun Life au Québec, signale que l'instabilité économique n'est pas la seule responsable. Elle relève aussi les phénomènes de l'accroissement de l'endettement, l'augmentation des coûts des soins de santé, l'espérance de vie accrue et le manque de planification.

Parmi les Canadiens qui s'attendent à continuer de travailler après 65 ans, l'âge habituel de départ à la retraite, 61 pour cent disent qu'ils le feront parce qu'ils le doivent, et seulement 39 pour cent parce qu'ils le souhaitent.

L'étude a relevé que 47 pour cent des répondants s'inquiètent de la situation économique actuelle et pour 44 pour cent des Canadiens, le remboursement des dettes est la priorité absolue. Ils sont beaucoup plus nombreux que ceux dont la priorité est l'épargne en vue de la retraite, soit 20 pour cent.

L'étude a été menée en ligne par Ipsos Reid auprès de 3701 travailleurs canadiens âgés de 30 à 65 ans, entre les 29 novembre et 12 décembre derniers. Sa marge d'erreur est estimée à plus ou moins 1,6 pour cent, 19 fois sur 20.

RD

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mardi, février 21, 2012

 

Retraite et pauvreté : un dilemme pour les Québécois


ÉTAT DE LA SITUATION

(Journal de Québec, 12 février 2012)

Même si les experts voient venir le problème depuis 40 ans, tous les fonds de pension sont désormais déficitaires. 

Connaissant les conséquences dramatiques des baisses de revenus pour les adhérents d'un régime de pension et les effets catastrophiques pour la société, le gouvernement doit-il assurer la pérennité de ces régimes en taxant davantage les citoyens, et ce, même si trois-quarts des travailleurs du secteur privé n'ont pas de régime de retraite ?

Les sources de revenu des personnes âgées de 65 ans et plus ont évolué considérablement au cours des deux dernières décennies. Le système québécois actuel de sécurité du revenu des personnes âgées est composé de trois paliers:

Le premier regroupe les mesures d'assistance gérées par le gouvernement fédéral, à savoir la pension de la Sécurité de la vieillesse (PSV), le Supplément de revenu garanti (SRG) et l'Allocation au conjoint.
Le deuxième palier est défini par le Régime de Rentes du Québec (RRQ), tandis que le troisième palier porte sur les véhicules privés de retraite.

OPINION DE PATRIK MARIER

 (Patrik Marier est titulaire de la Chaire de Recherche en politiques publiques comparées au département de science politique à l'Université Concordia. Il est l'auteur de plusieurs ouvrages sur les réformes des régimes de retraite dans les pays industrialisés.)

« Le régime de retraite sans risque n'existe pas »

 C’est une question de principe. Le gouvernement ne va pas rembourser les pertes financières pour les travailleurs qui ont un REER ou un régime complémentaire à cotisation déterminée. Donc, pourquoi est-ce que l’État devrait intervenir et assumer les risques financiers des régimes complémentaires à prestations déterminées dans le secteur privé? Dans le secteur public, l’État doit aussi assumer les conséquences des bénéfices qu’il a octroyés à ses employés.

Le rôle de l’état est d’abord et avant tout d’établir les paramètres concernant la gouvernance de ces régimes. En conséquent, le mandat principal de la RRQ en est un de surveillance, et non de gestion. Dans la majorité des cas, les régimes complémentaires font l’objet de négociation entre la partie patronale et syndicale. Ce sont eux — et non le gouvernement — qui décident de la générosité des prestations, du montant des cotisations, et ce à l’intérieur des paramètres établis par la législation.
Risques inhérents

Il n’y a tout simplement pas de régime de retraite sans risque. La grande distinction entre les régimes privés de retraite concerne la nature du risque et le partage de ce risque. En ce qui concerne les REER — l’option par défaut pour la majorité des travailleurs du secteur privé — et les régimes à cotisations déterminée, ce sont les employées qui assument principalement les risques financiers et de gestion. Pour les régimes à prestations déterminées, l’employeur assume en grande partie ces risques. Par contre, les employés font aussi face à des risques associés au bien-être des entreprises qui les emploient.

Malheureusement, les anciens travailleurs et retraités de Nortel et Stelco sont très familiers avec cette réalité. Est-ce que l’État peut améliorer la protection offerte aux employés et retraités des compagnies en faillite? Oui. Par contre, l’état n’a pas – et ne devrait pas avoir - l’obligation d’assumer les pertes financières de ces régimes de retraite. Le faire serait tout simplement injuste envers les autres travailleurs qui ne bénéficient pas de ces garanties.

Vifs débats

Les déficits actuariels des régimes complémentaires à prestations déterminées du secteur public font présentement l’objet de vifs débats. Le gouvernement doit faire preuve de leadership et de créativité pour négocier des solutions qui vont permettre d’assurer le futur des services offerts par la fonction publique.

Pour les employés, le risque demeure que le gouvernement décide d’adopter unilatéralement une réforme pour forcer la main des syndicats comme c’est présentement le cas au Royaume-Uni.
OPINION DE LOUIS PLAMONDON

(Président de l'AQDR : Association québécoise pour la défense des droits des personnes retraitées et préretraitées. Retraité de l'Université de Montréal. De 1975 à 2008, il y a dirigé des programmes dans le domaine de la gérontologie et de l'intervention en victimologie. Il a publié, entre autres, « Vieillir en sécurité » (2011), distribuée à plus de 400 000 exemplaires.)



« Droits à la retraite au banc des accusés »

Un grand danger menace les plus de soixante ans d’aujourd’hui et de demain : le droit à une retraite acquise est attaqué de toute part.

Les aînés sont accusés d’être à la source des problèmes des entreprises, des services publics et des déficits de l’état ; le projet de M. Harper de réduire le programme de pension est la pire conséquence.

Les aînés sont accusés d'être à la source des problèmes des entreprises, des services publics et des déficits de l'État; la sortie de M. Harper de réduire le programme de pension est la pire conséquence.
Les régimes de retraite et les retraités seraient-ils à l'origine de ces difficultés? Mais, qu'en est-il en réalité?

SANS RECOURS

Nos fonds de retraite ont été pillés, détournés de toutes sortes de manières dans les deux dernières décennies et les aînés se retrouvent sans recours parce que ces régimes sont administrées par des structures patronales qui excluent les retraités. Pire encore, la prochaine génération des 50 ans est plus à risque de se voir priver de son droit de retraite et de devoir travailler au-delà de 65 ans, comme leurs grands-parents à la fin des années soixante! Mais pourquoi?

Les systèmes de retraite canadiens sont généralement capitalisés sur la base des cotisations des employeurs à titre de SALAIRES différés. En principe, les prestations découlent du placement de ces capitaux et les régimes se sont toujours bien comportés durant les cinquante dernières années accumulant des milliards de surplus jusqu'en 2006. Alors, pourquoi la situation a-t-elle changé du tout au tout?

Il faut se rappeler qu'à certaines périodes, les rendements étaient si positifs que les employeurs ont décrété des congés de cotisations pour eux-mêmes et les cotisants. Alors, lorsqu'est apparu le choc boursier de 2008, avec des rendements fortement amoindris, les surplus avaient fondu et ne pouvaient pas compenser la brutale chute boursière. C'est ce qui explique en partie la situation financière actuelle des régimes de retraite. Le déficit des régimes est surtout dû aux conduites téméraires de leurs administrateurs au moment des vaches grasses.

LACUNES DE GESTION

Les employeurs contrôlent la gestion des régimes selon la loi, Il rejettent pourtant sur le dos des retraités et des employés les conséquences de leurs lacunes de gestion et les conséquences de leurs appâts du gain. La Caisse de dépôt a eu la même conduite avec des pertes inexcusables de 20 milliards de dollars dans le patrimoine des Québécois.
En 1998, sous le gouvernement Bouchard, les surplus très importants du régime de retraite public ont été utilisés pour réduire le déficit de gestion des affaires courantes en mettant à la retraite dès 55 ans quelque 35 000 employés de l'État. Le vérificateur général avait dans son rapport dénoncé le procédé et son impact très risqué sur les régimes de retraite publics.

Monsieur Harper veut faire payer aux aînés son déficit découlant de ses réductions  de la TPS et des impôts corporatifs. Notre droit à la retraite et notre avenir sont menacés en raison de ces décisions financières et politiques. Voilà ce qui se cache sous les discours alarmistes concernant les coûts de nos retraites et l'avenir des aînés.

RD

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Les Québécois mal préparés pour leur retraite


Sondage Léger Marketing-QMI, Article de Taïeb Moalla, Journal de Québec, 7 février 2012

Même si leur retraite approche à grands pas, plus du tiers des Québécois entre 55 à 64 ans ont épargné moins de 100 000 $ pour leurs vieux jours, indique un sondage Léger Marketing-Agence QMI réalisé sur internet le 2 février.

Le chiffre est d'autant plus impressionnant que les répondants devaient inclure tous leurs placements financiers et immobiliers dans le calcul. «Ce n'est pas beaucoup d'argent pour la retraite, affirme Aubert Lavigne-Descoteaux, de Léger Marketing. En plus, on a 17 % de cette tranche d'âge qui ne sait même pas combien elle a épargné. C'est souvent ces mêmes personnes qui n'ont pas fait de plan de retraite.»


Les «moins de 100 000 $» forment d'ailleurs une majorité (58 %) lorsqu'on élargit la question aux répondants de 30 à 64 ans. «La moitié des Québécois ne sont pas prêts à faire face à la retraite. À tout le moins à prendre leur retraite à 65 ans. Ils n'en ont pas les moyens», selon M. Lavigne-Descoteaux.

L'inquiétude règne

Logiquement, une écrasante majorité des sondés (84 %) se disent inquiets quant au maintien des régimes de pensions de vieillesse pour les générations à venir. «On a la même inquiétude généralisée quel que soit le lieu de résidence ou la catégorie d'âge ou de revenu, souligne Aubert Lavigne-Descoteaux. On remarque aussi que les femmes sont plus inquiètes que les hommes. C'est une tendance assez marquée dans les sondages.»


Malgré cette inquiétude affichée, les Québécois ne semblent pas être très chauds à l'idée de réformer le système. Pour 46 % des répondants, il est préférable de «maintenir le régime de pensions dans sa forme actuelle et financer les dépassements de coûts du régime à même le budget fédéral». Quelque 41 % pensent, au contraire, qu'il vaut mieux « réformer le régime de pensions de vieillesse en haussant les cotisations ou l'âge de la retraite à 67 ans par exemple ».

Bref, «l'avenir du régime de pensions ne fait pas consensus au Québec. Presque la moitié ne veulent pas qu'on y touche», indique le sondeur.

RD

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Maîtriser son avenir en tant que retraités


Article de Nathalie Elgrably-Levy, économiste senior à l'Institut économique de Montréal, Journal de Québec, 16 février 2012

 Le système de retraite québécois, non viable et peu performant, inquiète. 
Pour trouver des solutions, la ministre de l’Emploi et de la Solidarité sociale, Julie Boulet, a mandaté un comité d’experts pour réfléchir sur l’offre des régimes complémentaires. En revanche, le Régime des rentes du Québec, notre régime de retraite universel administré par l’État, n’est pas remis en question. Pourtant, il est loin d’être irréprochable. Accepterions-nous qu’une banque nous oblige à acheter un produit financier pour lequel elle promet un rendement intéressant alors qu’elle est incertaine de pouvoir respecter ses engagements?

Accepterions-nous qu’à notre décès, la banque hérite de nos économies? Jamais! C’est néanmoins selon un principe très similaire que fonctionne le Régime des rentes du Québec.

En collaboration avec notre employeur, nous envoyons 10,05% de notre revenu à la Régie des rentes du Québec (ce taux augmentera de 0,15% par année pour atteindre 10,80% en 2017).

On nous dit qu’on épargne pour nos vieux jours alors que les sommes récoltées servent à verser les prestations aux retraités actuels. On nous fait croire que l’argent nous appartient, alors qu’il n’en est rien. Par exemple, quand le cotisant décède, ses contributions sont saisies en tout ou en partie par le Régime. Si le défunt n'a ni conjoint ni enfant mineur, ses cotisations sont entièrement empochées par le régime. Au mieux, les héritiers reçoivent une prestation de décès de 2500$.

Pour le commun des mortels, ce mode de fonctionnement répond à la définition d’une escroquerie pyramidale. Pour la classe politique, il assure « l’équité intergénérationnelle »!

Le comité se trompe de cible en limitant son analyse aux régimes complémentaires. Il ferait mieux de s’attaquer au coeur du problème, soit le principe même de la retraite par répartition. Il pourrait étudier le système chilien et peut-être même s’en inspirer. Après tout, il a été imité par une trentaine de pays (y compris la Suède!) et est reconnu par le FMI comme étant un modèle.

En 1981, confronté à un système de retraite en faillite, le Chili remplace son régime public par un modèle basé sur des comptes individuels de capitalisation. Aujourd’hui, les travailleurs sont propriétaires de leur compte d’épargne-retraite et peuvent le confier à l’institution de leur choix. Ils déterminent également leurs placements en fonction de leur tolérance au risque et de leurs préférences et, à leur décès, c’est leur famille, et non l’État, qui hérite de l’intégralité du régime. Côté rendement, il est enviable : depuis l’implantation du régime en 1981, la rentabilité annuelle moyenne du fonds principal dépasse 9%.

L’État québécois a pris en charge nos retraites parce qu’il nous en jugeait incapables. L’expérience montre que c’est lui qui est inapte à garantir notre sécurité financière. Pire encore, il nous impose un système immoral. Il est donc temps de le relever de ses fonctions. Les Québécois n’ont pas à être dépendants de l’État. À l’instar des Chiliens, nous sommes parfaitement capables de gérer un compte d’épargne-retraite. Mais pour cela, notre classe politique doit sortir de son prisme idéologique et rendre aux travailleurs la maîtrise de leurs finances et de leur avenir!

COMMENTAIRE DE PHILOMAGE

Cette prise de position mérite réflexion. Elle suggère d'étudier l'expérience chilienne en termes de réforme de nos régimes de retraite, en remettant en question la Régie des Rentes du Québec et ses pratiques. Qu'est-ce que l'on attend pour bouger?

RD

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mercredi, février 15, 2012

 

L'Ontario trouve la facture «santé» des aînés onéreuse


Le gouvernement ontarien n'a plus les moyens de payer tous les médicaments d'ordonnance pour toutes les personnes âgées, affirme l'économiste Don Drummond dans son rapport portant sur les moyens de régler le déficit de 16 milliards $ de la province. (PC, 15 février 2012)

«L'Ontario doit amorcer une discussion ouverte et honnête sur la couverture publique des coûts liés aux soins de santé», déclare M. Drummond dans le document de 500 pages présenté mercredi. «Il faudrait minimalement hausser de manière importante la portion des frais de médicaments assumés par les aînés en fonction de leurs revenus.»

La province a déboursé 44,77 milliards $ l'an dernier en santé, soit environ 40 pour cent de ses dépenses totales.

La majorité des 362 recommandations formulées par l'ancien économiste principal de la Banque TD dans son rapport touchent le système de santé de l'Ontario. Il conseille notamment que la croissance annuelle des dépenses dans ce secteur soit limitée à 2,5 pour cent, alors qu'elle s'élève à 6,5 pour cent depuis huit ans.

Don Drummond suggère aussi de privilégier les soins prodigués dans la communauté afin d'éviter que les patients ne soient traités dans les hôpitaux, dont les activités sont plus coûteuses.
«Il ne faut pas appliquer les mêmes mesures d'austérité financière à tous les secteurs du système de santé. Certains d'entre eux, comme les soins de proximité et les soins en santé mentale, devront croître plus rapidement que les autres», indique-t-il. «D'un autre côté, en mettant l'accent sur la communauté plutôt que sur les hôpitaux, les budgets de ces derniers pourront augmenter moins rapidement que ceux des autres secteurs.»

Le gouvernement ontarien devrait également cesser de négocier avec les médecins, par le biais de l'Association médicale de l'Ontario, quels services et procédures sont couverts par l'assurance-maladie de la province, et plutôt élargir le mandat de l'organisme de surveillance Qualité des services de santé Ontario afin qu'il détermine les actes médicaux qui bénéficient d'une couverture publique.
Selon M. Drummond, les médecins ontariens, qui sont les mieux payés au pays, ne devraient pas non plus obtenir d'augmentation en cette période de restrictions budgétaires.

L'économiste recommande aussi que les 14 Réseaux locaux d'intégration des services de santé (RLISS) reçoivent davantage de pouvoirs et qu'ils intègrent les soins de santé primaires dans leur mission. Il va même jusqu'à proposer la fusion des RLISS avec les Centres d'accès aux soins communautaires afin de mieux coordonner les services.

Don Drummond suggère aussi à l'Ontario de former davantage d'infirmières, de permettre aux infirmières cliniciennes d'effectuer un plus grand nombre d'actes médicaux actuellement assurés par les médecins et, à l'instar de la Nouvelle-Écosse, de demander aux ambulanciers de fournir des soins à domicile lorsqu'ils ne répondent pas à une urgence.

Le vieillissement de la population continuera à exercer de la pression sur le système de santé de la province, note M. Drummond, qui soutient qu'un pour cent des Ontariens sont responsables de 34 pour cent des dépenses du gouvernement dans le secteur de la santé.

COMMENTAIRE DE PHILOMAGE

L'Ontario, comme le Québec, d'ailleurs, n'échappe pas aux coûts croissants de son budget consacré à la santé. Dans cette équation, il ne faut pas oublier que, durant toute leur vie, les coûts liés à la santé pour la plupart des gens sont réduits ou peu élevés.

Ce n'est que lorsque les aînés atteignent un âge avancé que les besoins en soins médicaux prennent l'allure d'une courbe exponentielle. Faut-il s'y objecter ou bien, ajuster le tir pour que tous les citoyens aient accès aux services médicaux, au moment où ils en ont le plus besoin ? La réponse vient d'elle-même, vous ne trouvez pas!!!

RD

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dimanche, février 05, 2012

 

Ne touchez pas à nos rentes!

Tel est le cri d'alarme de nos pensionnés suite aux intentions du gouvernement conservateur d'apporter des changements au régime de prestations de la Sécurité de la vieillesse. 

 Josée Jeffrey, Collaboration spéciale, Journal de Québec, 3 février 2012



Tel est le cri d'alarme de nos pensionnés actuels ou futurs suite aux intentions du gouvernement conservateur d'apporter des changements au régime de prestations de la Sécurité de la vieillesse (SV) et de repousser l'âge de l'admissibilité à ce programme de 65 ans à 67 ans, et ce, dans le but, selon M. Harper, d'assurer sa viabilité.


Rien ne se fera à court terme et si changement il y a, le tout se fera progressivement, selon certains économistes. On ne sait pas encore comment ni quand cette réforme sera appliquée. D'ailleurs, le ministre des Finances a affirmé qu'il n'y avait rien à cet effet dans le prochain budget. Ce qui s'avère exact et fâcheux par contre, c'est toute l'inquiétude que cette annonce-surprise a semée auprès des particuliers.

Pour ma part, ce qui me surprend le plus est que ces intentions ne sont pas en ligne avec les mesures annoncées dans le dernier budget fédéral. Je vous rappelle que dans son budget du 6 juin 2011, M. Harper annonçait des mesures pour venir en aide aux aînés les plus vulnérables, des aînés qui ont travaillé dur toute leur vie afin de bâtir une meilleure société et un meilleur pays.

Il a même instauré une nouvelle mesure permettant d'accroître la sécurité financière de plus de 680 000 aînés au pays. Cette mesure est une prestation complémentaire du Supplément de revenu garanti. Alors, pourquoi ce revirement inattendu?

Deux années supplémentaires de vaches maigres

En reportant l'âge de l'âge de l'admissibilité à SV à 67 ans, les moins nantis pourront continuer de recevoir l'aide de dernier recours. Le fédéral rejetterait ainsi la responsabilité aux provinces.
Toutefois, ce montant n'est pas bonifié comme la prestation de la SV l'est lorsque le seuil du revenu ne dépasse pas 16 638 $ pour une personne seule ou 21 648 $ pour un couple de pensionnés. Rappelez-vous que ce seuil ne considère pas la prestation de la SV.

De plus, un prestataire de l'aide sociale peut gagner 2400 $ par année (200 $ par mois) sans réduction de son montant de base ce qui n'est pas le cas pour la pension de la SV. Du côté fédéral, en plus de recevoir la prestation de la SV, nos aînés peuvent gagner un revenu d'emploi de 3500 $ avant que leur Supplément de revenu garanti soit réduit. Un autre manque à gagner à prévoir.

Il va sans dire que la retraite paisible devient de plus en plus difficile à prévoir avec toutes ces nouvelles embûches combinées avec l'espérance de vie grandissante. Les rendements espérés des placements à la baisse affectent sans cesse la survie du pécule retraite. Sans compter les fonds de pension amputés par les entreprises en difficulté. Les régimes de retraite ne sont pas protégés.

Actuellement, les pensionnés dont le revenu personnel net est supérieur à 69 562 $ doivent rembourser une partie ou l'intégralité de leur pension de la SV. La récupération totale est atteinte lorsque le revenu net atteint 112 772 $. À mon sens, il serait plus raisonnable de réduire ce seuil de récupération au lieu de s'attaquer aux moins nantis.

Pendant ce temps, on apprend, selon un rapport de la Fédération des contribuables que M. Harper aura droit à une rente de retraite d'au moins 223 500 $ par année du gouvernement.
Cela dit, Harper ne doit pas augmenter la pauvreté de nos aînés. Trouvons d'autres moyens pour rentabiliser le régime de prestations de la SV.

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Les boomers responsables d'un hold-up intergénérationnel?


POINT DE VUE de Jean-Claude Grondin, président du Féseau FADOQ, Journal de Québec, 5 février 2012

À trop vouloir accuser, on oublie les vrais enjeux!

Le discours populaire est très rapide à vouloir identifier des coupables pour expliquer les maux que connaît notre société québécoise. Avec la récente crise économique et les impacts que celle-ci a eu sur les finances publiques et dans le rendement des caisses de retraite, ce sont les baby-boomers qui ont été mis au banc des accusés.

Cependant, cette pensée simpliste n'est pas aussi magique qu'elle peut le laisser paraître.

RÉGIMES COMPLÉMENTAIRES

Prenons par exemple les régimes complémentaires de retraite. Il est très facile d'expliquer les déficits actuels par les départs massifs à la retraite et de catégoriser les retraités comme des « enfants gâtés » qui dérobent tout sur le passage en n'ayant aucune pensée pour leurs prochains. Or, c'est oublier que s'il existe de tels déficits aujourd'hui dans les caisses de retraite, c'est plutôt parce que pendant des années, les caisses de retraite étaient très rentables et que plusieurs employeurs se sont payé des congés de cotisation et ont utilisé ces fonds à d'autres fins qu'à accumuler de la richesse pour les futurs retraités.
C'est aussi oublier que lorsque ces personnes, aujourd'hui retraitées, ont été embauchées, le régime de retraite faisait partie de leurs conditions de travail. Ces régimes constituent des contrats entre l'employeur et l'employé selon lesquels ce dernier accepte de différer une partie de son salaire présent pour une rente future. Aurait-il été préférable que les baby-boomers n'aient pas mis cet argent de côté et que, rendus à 65 ans, ils vivent aux crochets de la société? Au contraire, les aînés qui ont des revenus adéquats parce qu'ils ont été prévoyants continuent de contribuer financièrement à la société.

OPPOSITION RÉDUCTRICE

Il est également très réducteur d'opposer des dossiers aussi importants que la santé et l'éducation. D'abord, il est faux d'affirmer que l'augmentation des dépenses en santé est attribuable au vieillissement de la population. En fait, le vieillissement de la population compte pour 1,1 % des dépenses en santé alors que l'achat de nouvelles technologies représente le plus important poste budgétaire. Les baby-boomers ont également à coeur le système d'éducation accessible et abordable, car n'oublions pas que c'est cette même génération qui l'a mis en place dans les années 60.

Pour le Réseau FADOQ, qui s'est associé à la Fédération étudiante universitaire du Québec (FEUQ) et la Fédération étudiante collégiale du Québec (FECQ) pour rédiger un manifeste sur la solidarité intergénérationnelle, c'est plutôt en unissant nos voix solidairement que nous pourront ériger une société plus juste pour aujourd'hui et pour demain.

POINT DE VUE DE JOHANNE MARCOTTE

 Journal de Montréal et de Québec, page Idées, dimanche 5 février 2010 – Il faudra ramasser les pots cassés

Aux dernières nouvelles, le gouvernement du Québec emprunte chaque année pour payer les retraites de ses employés alors que les régimes de retraite des employés du gouvernement fédéral seraient dans le trou d’environ 227 milliards $. Quant aux régimes de retraite des employés municipaux, les Québécois vont devoir, cette année seulement, renflouer leurs coffres à coups de 800 millions $!

Les travailleurs québécois surtaxés et surimposés – dont 60% n’ont pas de régimes de retraite –  paient donc pour les régimes de retraite des employés du gouvernement du Canada, du gouvernement du Québec et des municipalités: tous déficitaires!  Juste en intérêts sur la dette liée aux régimes de retraite des employés du gouvernement du Québec, on parle de 2,6 milliards en 2011 seulement!

LES BABY-BOOMERS ONT TROP PEU COTISÉ

D’ici 10 ans, alors que la très grande majorité des baby-boomers employés syndiqués de l’État auront pris leur retraite, les générations qui les suivent devront ramasser les pots cassés.

Prétendre que les baby-boomers du secteur public auront travaillé et cotisé suffisamment “toute leur vie” pour se mériter leurs généreux régimes de retraite est non seulement surréaliste mais mensonger. De toute évidence, cette cohorte d’employés n’aura  jamais contribué à la hauteur des prestations qui lui sont promises.

Prétendre qu’ils auront contribué suffisamment à la Régie des rentes du Québec ou à la “Pension de vieillesse” est également faux. Dans le premier cas, on a longuement retardé l’augmentation du taux de cotisation et dans le deuxième, la “Pension de vieillesse” n’est pas un programme auquel on cotise mais un programme social universel du gouvernement fédéral.

Sont-ils responsables pour autant d’un “hold-up intergénérationnel”? Certainement en partie. Mais soyons francs. S’il y a hold-up du portefeuille du travailleur québécois, il est celui de nous tous qui avons développé une dépendance envers un Gouvernemaman duquel il est maintenant difficile de s’affranchir.

PROMESSES INSOUTENABLES

Si les infrastructures s’effondrent aujourd’hui et si le Québec arrive au 5e rang des nations les plus endettées, c’est que nous avons laissé nos élites politiciennes nous berner et nous bercer de promesses que nous savons maintenant être insoutenables à long terme.

Qu’il s’agisse du gel des droits de scolarité, du programme de garderies à 5$, de l’assurance médicaments, ou des milliards de dollars en subventions aux entreprises pour soit-disant “sauver des emplois”, tout cela n’est pas que l’affaire d’une génération mais l’affaire de nous tous.

L’État bienveillant nous a bernés et nos élites politiciennes en ont profité pour acheter notre vote. Vous laisserez-vous berner encore longtemps?

COMMENTAIRE DE PHILOMAGE

La première idée qui ressort de ces deux points de vue, c'est que nous vivons, individuellement et collectivement, au-dessus de nos moyens. Nous ne sommes pas les seuls dans le monde; en Europe, il y a plusieurs pays qui sont dans une situation semblable : la Grèce, l'Espagne, le Portugal, l'Italie, et bien d'autres...

Mettre un frein à l'expansion des programmes en place ou en créer de nouveau (fécondation artificielle, par exemple) n'est pas facile pour n'importe quel gouvernement. Le gouvernement Libéral doit se faire réélire tout en comprimant au maximum les incompressibles dépenses en santé et en éducation, en garderies, en médicaments, en services sociaux, etc. Les Partis de l'Opposition doivent ajuster leur tir pour se faire élire en voulant faire mieux en ne bousculant personne. Sinon, c'est la défaite assurée. Et la spirale continue.

Dans un monde idéalisé, on voudrait réunir les conditions suivantes :

- Des électeurs et électrices matures et sérieux qui sont prêts à mettre l'épaule à la roue; accepter une réduction des services de l'État par un usage modérée et plus rationnel et/ou en payer une partie en s'appuyant sur le Privé, si nécessaire;
- Arrêter de mettre de l'avant des politiques farfelues comme l'Indépendance qui crée un climat politique et social instable et fait fuir les investissements à moyen et long terme;
- Créer un monde de jeunes qui se préparent à être une élite non seulement dans le sport mais aussi sur le marché du travail en misant sur la qualité de l'éducation et de la formation continue (recyclage, mise à jour des savoirs, etc.) et sur une forte diplomation dans tous les secteurs de l'économie, particulièrement dans ceux à forte valeur ajoutée ou intensifs en technologie;
- Ajuster les conditions d'emploi et de ressourcement des personnes encore aptes au travail, dès la cinquantaine pour que le marché du travail puisse profiter de leur capacité à réaliser des tâches complexes, se servir de leur mémoire corporative ou de leurs expériences accumulées au fil des ans;
- Miser sur les grands projets (Grand Nord, barrages hydroélectriques, mines, exploitation forestière, créneaux industriels et de services à forte valeur ajoutée, etc.) axés sur le développement des ressources naturelles;
- Tarifer les services de l'État de façon à ne pas introduire de l'iniquité dans la société québécoise;
- Garder en place les régimes de retraite public et privé et ajuster  leur contenu intergénérationnel;

- Etc.

L'importance du secteur de la dette québécoise est liée largement à notre capacité à créer de la richesse collective. Avec la moitié de son territoire inexploité, le Québec a toutes les chances du monde de s'éclater au plan du développement et de la croissance économique dans un proche avenir et d'en faire profiter sa population toute entière.


Il est complètement farfelu de prévoir ce que sera la société québécoise dans les années 2030 et plus. Qui aurait dit qu'Internet deviendrait l'instrument qu'il est aujourd'hui, il y a vingt ans? Maintenant, c'est le monde entier qui bouge et s'entrechoque, à la lumière de la globalisation ou de la mondialisation. C'est là le danger d'écouter les prophètes de malheur qui projettent des problèmes structurels actuels dans le futur. Laissons bien vivre nos vieux et prenons-nous en main dès aujourd'hui et notre proche futur sera resplendissant à l'intérieur de notre magnifique pays, le Canada. C'est ce que nous dicte notre passé lointain et récent.

RD

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Le cas des retraites détournées, selon Mongrain


Article de Jean-Luc Mongrain, Journal de Québec, 5 février 2012


D’habitude, les médias s’attardent principalement à la nouvelle du jour. Celle qui fait parler sur le coup, qui est spectaculaire, suscite la curiosité et même un peu de voyeurisme. Il y a pourtant bien d’autres histoires tout aussi importantes, sinon plus.

Je pense ici au drame que vivent trop de retraités de différents milieux de travail qui ont vu leur fonds de pension fondre comme neige au soleil. Non seulement en raison des fluctuations du marché boursier, mais aussi par les entourloupettes de grandes compagnies qui, dans des circonstances particulières, n’assument pas leurs responsabilités envers leurs employés. C’est notamment le cas des gars de l’usine Papiers Fraser, à Thurso, et de Nortel.

DU VOL

Des milliers de travailleurs et travailleuses ont vu une grande partie des sommes prélevées chaque semaine pour leurs vieux jours partir en fumée parce que l’entreprise en difficulté a pu profiter de congés de cotisation. Dans certains cas, l’argent du fonds de pension des ouvriers a même été utilisé pour des opérations courantes.

C’est peut-être légal, mais immoral. Inhumain. Une forme de détournement des fonds à d’autres fins que de garantir une sécurité de retraite à d’honnêtes travailleurs. Tout ça en toute impunité.

AU BORD DU GOUFFRE

Et quand les choses dégénèrent jusqu’à un point de non-retour, la fin de l’histoire est dramatique. L’entreprise se place sous la protection de la Loi sur la faillite ou même sous la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies, et les retraités floués se retrouvent Gros-Jean comme devant; c'est-à-dire que les travailleurs qui ont cotisé pendant toutes ces années sont « considérés » non pas comme des créanciers de premier rang ou privilégiés, mais bien comme les derniers à qui on versera des miettes, à condition qu’il en reste. Car bien avant eux se seront sustentées les banques et autres institutions financières.

Dans les faits, ils ne reverront jamais la couleur de leur argent. Ils ne goûteront pas non plus à la quiétude qu’ils croyaient s’être bâtie à la sueur de leur front.

URGENCE D’AGIR

Le lobby du monde des affaires et de la finan­ce est plus fort que celui du bon peuple, c’est connu. Sauf que la simple décence commanderait que le gouvernement encadre mieux le comportement des entreprises. Question de justice et de respect envers les travailleurs cotisants.

Je rappellerais à nos élus fédéraux qu’au moment où un député met 1 petit dollar dans son fonds de pension, le contribuable canadien, lui, en donne 23. En soi, ce ratio frise le scandale et je serais très surpris qu’un jour un retraité du Parlement se retrou­ve perdant parce que le Canada aurait fait faillite !

COMMENTAIRE DE PHILOMAGE

Il y a toutes sortes de remises en question dans notre société québécoise. Le débat sur l'euthanasie, le suicide assisté, les soins palliatifs, l'hébergement des aînés, la qualité des soins à domicile, l'accessibilité des soins de santé,.... Mais, actuellement, avec la précarité des économies industrialisées (y compris le Canada), on assiste à un nouveau débat qui touche quelque chose d'également fondamental : le droit à retirer une retraite en bonne et due forme, après des années de labeur au sein d'entreprises exigeantes et sans égard pour la main-d'oeuvre qui leur a permis de gagner des profits pendant des décennies et qui se retrouvent sur la paille pour nombre de raisons économiques ou d'affaires.

Les gouvernements (provincial et fédéral) doivent être à l'écoute et intervenir lorsque des travailleurs proches de leurs retraites perdent leurs acquis le plus précieux, celui de leur fonds de pension et/ou de retraités. Les Néo-démocrates utilisaient autrefois une expression bien explicite pour caractériser ce genre de comportement : ils appelaient ces entreprises délinquantes, des « Corporate bums ».

Le respect des droits des travailleurs est aussi fondamental que le droit de voter, parce que ceux-ci participent au quotidien à la création de la richesse économique qui maintient le niveau de vie de toute la population canadienne. Le Capitalisme sauvage n'a pas sa place dans notre pays, ni ailleurs. Il faut se le rappeler personnellement et le dire clairement à nos représentants élus ou nommés, les députés, les ministres et les sénateurs, qui nous représentent. Ce sont eux qui détiennent la pouvoir d'intervenir en notre nom et qui sont en mesure de rétablir l'équité sociale et le partage de la richesse au nom du bien commun.

Un chef d'entreprise véreux, avec une conscience sociale perverse, qui brime les droits des travailleurs, y incluant les fonds de pension, est coupable d'actes répréhensibles et doit être sanctionné par les Tribunaux, au même titre que le simple voleur ou l'arnaqueur, le violeur, le fraudeur, etc. (la liste des crimes sanctionnés est longue.)

RD

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vendredi, février 03, 2012

 

Retraite : le nivellement par le bas n'est pas la solution

 Article de René Vézina, LesAffaires.com, 4 février 2012

Nous vivons plus longtemps. Tant mieux. Mais les différents régimes de retraite, eux, vieillissent mal, parce qu'à l'origine, ils n'ont pas été conçus pour payer des rentes jusqu'à 82 ou 85 ans.

De 1975 à 2005, au Québec, l'espérance de vie d'une personne de 65 ans a progressivement augmenté de quatre ans. C'est énorme.

Les travailleurs qui ont cotisé à des régimes de retraite, privés ou publics, peuvent donc espérer vivre plus longtemps de leurs rentes. Par ailleurs, les régimes universels, comme le Programme de la sécurité de la vieillesse (la pension de vieillesse), puiseront davantage dans les coffres de l'État, puisque les personnes âgées seront de plus en plus nombreuses à attendre leur chèque.

Ce ne sont là que deux facteurs de changement dans l'équation toujours plus compliquée du soutien à la retraite. Ajoutez, comme pour simplifier les choses, les rendements anémiques des régimes, ces dernières années - alors qu'on prévoit d'autres périodes de vaches maigres avec des taux d'intérêt au plancher -, et vous verrez « qu'y en aura pas de facile », comme disait l'ancien entraîneur des Canadiens, Claude Ruel.

D'où l'intervention de Stephen Harper, à Davos, qui a clairement évoqué un report de l'âge auquel les fameuses pensions de vieillesse commenceraient à être versées, de 65 à 67 ans... au moins. Que les plus inquiets se rassurent, ce n'est pas pour demain, peut-être même pas avant la fin de la décennie, mais le compte à rebours est commencé.

Le paysage démographique a beaucoup changé au cours du siècle dernier. Autrefois, les personnes de 65 ans étaient considérées comme de petits vieux, à 70 ans, ils entraient dans la catégorie des vieillards, et 80 ans étaient un âge canonique. L'État attribuait une rente pour adoucir la dernière ligne droite d'une vie qui, de toute façon, s'achevait.

Mais les centenaires ne sont plus rares. Et attendez de voir la suite. En octobre 2009, un article de la réputée revue scientifique britannique The Lancer, affirmait que la majorité des enfants nés depuis l'an 2000 dans les pays industrialisés, y compris le Canada, franchiraient le cap des 100 ans! Recherches à l'appui, on y développait la thèse selon laquelle les gens ne vivent pas simplement plus longtemps, ils vivent également mieux.

Le poids des responsabilités

Cette observation ouvre la porte à une discussion plus large. Tôt ou tard, si rien ne change, nos sociétés seront ensevelies sous le poids de leurs responsabilités envers les aînés. Leur bonne forme relative les amènera à vouloir profiter bien légitimement de cette retraite prolongée. Nous arriverons donc inévitablement à un point de bascule, où il y aura trop de demandes par rapport aux ressources financières disponibles.

Que faire? Comment se préparer? Deux avenues sont le plus souvent mentionnées. La première consiste à réduire la hauteur des rentes, pensions et avantages en tous genres. Si plus de personnes recevaient des versements plus longtemps, il n'y aurait qu'à baisser les montants et l'équilibre serait préservé. Il suffirait de comprimer les dépenses et le tour serait joué.

Le problème avec cette méthode, c'est que les besoins, eux, ne diminuent pas. C'est comme si, avec plus d'invités autour de la table, on servait de plus petits morceaux de la même tarte. À la fin, les gens ont encore faim. Le nivellement par le bas ne règle rien.

Mais si on faisait en sorte que moins de monde arrive à la table en même temps? Autrement dit, si on prenait en compte l'allongement de l'espérance de vie pour retarder le versement des prestations ? De toute manière, comme on vient de le mentionner, les prestataires d'aujourd'hui ont toutes les chances d'en recevoir bien plus longtemps que leurs prédécesseurs. Eux mouraient jeunes, ou presque. C'est de moins en moins le cas. Au bout du compte, l'échange demeure profitable.

Il faudra cependant revoir en profondeur notre conception du travail et notre perception de la contribution des gens plus âgés. Les inciter à demeurer actifs est une chose, leur en donner l'occasion en est une autre. On devra aussi repenser des formules imaginées plus tôt, mais qui ne tiennent plus la route aujourd'hui, comme la pleine retraite dont peuvent bénéficier les policiers dès l'âge de 50 ans.

Évidemment, il serait plus commode de fermer les yeux et de faire semblant que le statu quo est préférable au changement. Désolé. Dans ce cas-ci, il contredit plutôt les valeurs fondamentales d'une société qui se targue d'équité et de solidarité.

COMMENTAIRE DE PHILOMAGE

La vision exprimée par ce journaliste s'inscrit dans un contexte figé des années 80. D'abord, la crise démographique définie en terme de carence en main-d'oeuvre est connue depuis les années 70. Les démographes du Québec ont signé nombre d'études signalant vers quoi on s'en allait.

La vague des baby-boomers des années 45 allait continuer à déferler et à changer la société québécoise du tout au tout. C'est ce qui arrive maintenant avec leur arrivée à la retraite en 2013. La question fondamentale est celle de la relève, tant au niveau des entrepreneurs que des cohortes de main-d'oeuvre. Ce qui fait la qualité de cette main-d'oeuvre n'est pas nécessairement reliée à leur nombre, mais à d'autres variables comme la productivité et la formation.

La recette de base est relativement simple  :

- Oui, certains régimes de retraite comme ceux des policiers sont à rééquilibrer. Ils sortent de la norme et sont le fruit de négociations où le Législateur a baissé les bras.

- Oui, tous les travailleurs ont droit, de la part du Fédéral à une rente de vieillesse et à un supplément adéquat. Elle est donnée à tous les citoyens canadiens du fait de notre appartenance et de notre contribution à l'essor de ce grand pays.

- Oui, il faut repenser les régimes de retraite pour les mettre à jour et bien répartir les coûts intergénérationnels.

Mais, les réponses viennent aussi de la conduite de l'économie :

- Faire disparaître les emplois désuets pour réduire les besoins en main-d'oeuvre dans des secteurs non productifs ou non essentiels. Automatiser dans la mesure du possible.

- Favoriser l'émergence d'une main-d'oeuvre jeune, bien formée et expérimentée, en valorisant le diplôme et le transfert de connaissances et de l'expérience des 30-65 ans sur le marché du travail.
- Mettre l'accent sur les secteurs à haute valeur ajoutée, très intensifs en technologie et beaucoup moins en main-d'oeuvre.
- Investir dans la mise à niveau des compétences des travailleurs expérimentés. Ce que l'on appelle la formation continue.
- Investir dans les grands projets ou travaux comme la mise en valeur du Plan Nord, les barrages hydroélectriques.
- Recruter des investisseurs étrangers.
- Favoriser les productions à forte valeur ajoutée dans des créneaux exclusifs ou avec des avantages comparatifs majeurs pour le Québec.
- Renforcer les marchés d'exportation ou leurs diversifications, aux USA, en Europe, en Asie ou au Moyen-Orient.
- Favoriser l'immigration sélective.
- Etc.

On est loin des solutions suivantes : forcer le retour au travail des retraités, retarder de 65 à 67 ans l'âge de la retraite, ou réduire les rentes attribuées aux prochaines générations de retraités.

Une société canadienne riche et équitable doit respecter la retraite de ceux qui ont bâti ce pays, les aînés d'aujourd'hui et de demain.

RD

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Face à la maladie d'Alzheimer, les résidences privées démunies

 
Auteure : Annie Gagnon, Agence QMI, Canoe.ca, 02/02/2012

Les résidences privées pour aînés au Québec demeurent peu outillées quand vient le temps de prendre soin des personnes âgées atteintes de démence telle que la maladie d'Alzheimer, révèle une enquête de l'émission «J.E.», diffusée sur les ondes de TVA.


Une collaboratrice de l'émission a travaillé l'équivalent d'un mois et demi dans des résidences privées de Montréal et de la Rive-Sud, après avoir suivi un cours de préposée aux bénéficiaires dans un centre de formation privée. Grâce à une caméra cachée, elle a obtenu des images troublantes qui témoignent d'une triste réalité.

Dans une résidence montréalaise, le personnel lui a confié rapidement des patients atteints de déficits cognitifs, certains ayant même des comportements agressifs, mais les préposés ont omis de l'en informer.

Dans un autre établissement, des personnes âgées, souffrant toutes, à différents degrés, de déficits cognitifs, sont bousculées dès le réveil pour arriver à l'heure au déjeuner. La préposée en chef d'une résidence privée de la Rive-Sud témoigne : « On amène les culottes d'incontinence et les souliers. Il ne faut pas perdre de temps. On amène la poubelle en même temps qu'on s'occupe des résidents ! Pendant qu'ils font pipi, moi je les habille, ce sont tous des trucs pour sauver du temps !»

Le rythme est effréné au point où on utilise la même débarbouillette pour tout le corps lors des toilettes partielles.

En entrevue à «J.E.», une ex-préposée aux bénéficiaires, qui a travaillé deux ans de jour et de nuit dans le même établissement, raconte qu'elle devait faire la toilette partielle d'une douzaine de résidents avant 7 h le matin. « Ça implique de réveiller les patients à environ 3 h 30 du matin même s'ils se sont endormis à 21 h le soir précédent », a expliqué l'ex-employée.

« Quinze patients pour un préposé, ça n'a pas de bon sens! On ne peut pas s'occuper correctement des patients qui ont des troubles cognitifs. Malheureusement, on voit ça aussi dans nos centres de santé publics », a réagi Marie-Chantal Ménard, omnipraticienne et spécialiste de la maladie d'Alzheimer.
Dans le tourbillon des activités matinales, des erreurs se glissent aussi. Tantôt une préposée oublie de prendre le taux de glycémie d'un résidant, tantôt on administre le mauvais médicament. « Crachez ! Crachez! Mon Dieu, comment ça, je me suis trompée ? Je vais être obligée d'aller me calmer (…) j'ai fait une erreur », s'exclame la préposée en chef d'une autre résidence.

  
Une formation limitée

Une collaboratrice de «J.E.» a suivi une formation de préposée aux bénéficiaires d'un mois au Centre de formation Saint-Michel à Montréal. Le cours qui n'est pas reconnu par le ministère de l'Éducation comporte 35 heures de théorie et 80 heures de stage pratique en milieu de travail. Mais dans les faits notre étudiante n'a passé que 12 heures en classe.

Pour travailler comme préposé aux bénéficiaires en résidence privée, on n'exige aucune formation particulière. À l'inverse, pour être embauché dans un établissement public, comme un CHSLD, le préposé devra obligatoirement avoir suivi une formation de plusieurs centaines d'heures, reconnue par le ministère de l'Éducation. Pourtant les deux employés vont soigner le même patient souffrant des mêmes maladies.

Comme les CHSLD débordent, les personnes âgées atteintes d'Alzheimer se retrouvent de plus en plus nombreuses dans les établissements privés, désignés souvent comme «ressources intermédiaires».

Au Québec en 2009, près de 120 000 personnes souffraient de cette forme de démence et cela n'ira pas en diminuant. D'ici 20 ans, on estime à près de 200 000 les personnes qui en seront atteintes.

 COMMENTAIRE DE PHILOMAGE


Le dérapage dans les résidences publiques et privées concernant les aînés en perte d'autonomie est bel et bien commencé. Tant que le nombre de patients ou de résidents reste relativement stable, les personnes assignées aux soins pour les aînés peuvent remplir leurs tâches assez bien merci, mais, si cette donnée devient croissante, alors c'est la panique et le désordre s'installe à demeure.

Dans ce cafouillis, on peut en déduire deux grandes constatations : 

1) La planification des besoins face à une clientèle croissante d'aînés avec des besoins lourds n'existe pas ou presque pas; on s'ajuste comme on peut. Pourtant, on sait très bien qu'avec l'arrivée des baby-boomers à la retraite, il y aura un accroissement inévitable de la clientèle et des besoins dit lourds  ( un « rush »)  dans les résidences publiques ou privées. 
2) Deuxièmement, la question de la formation des préposés commence à percer et à faire l'objet d'une attention particulière. 

La formation est une donnée fondamentale pour maintenir la qualité des soins et développer des façons de faire appropriées face à la clientèle des personnes âgées.  Pourquoi pas mettre en place et/ou en valeur ce genre de cursus dans nos institutions scolaires (secondaire, collégial et universitaire). C'est un nouveau débouché pour nos diplômé(e)s qui va permettre d'offrir nombre de nouveaux emplois bien rémunérés, tout en répondant à un besoin social grandissant.


Enfin, y-a-t-il une étude en cours sur l'évaluation de ces besoins et les correctifs à y apporter, avant que la situation ne devienne incontrôlable, avec un éventuel débordement à l'échelle du Québec ? Une belle étude de maîtrise ou de doctorat à réaliser et à déposer entre les mains de nos chers et diligents fonctionnaires québécois ! Beaucoup plus intéressant que d'étudier le sexe des fourmis rouges dans un lointain désert africain..... 

Pendant ce temps-là, Mme Blais, la ministre responsable des Aînés planche sur une nouvelle politique axée sur le « restez chez soi » le plus longtemps possible, qui devrait aboutir ce printemps-ci. 

Quel bordel!


RD

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