mardi, février 28, 2012

 

Bilan des CHSLD québécois : encore beaucoup de mauvais soins


Article de Rémi Nadeau, Journal de Québec, 27 février 2012

Bien que des inspections ont révélé de graves lacunes dans plusieurs établissement, certains CHSLD continuent de les tolérer.


Huit ans après l’implantation d’un processus gouvernemental d’inspection, des CHSLD n’offrent toujours pas de services décents aux aînés qui leur sont confiés.

Encore pire, certains établissements continuent de tolérer de graves lacunes qui avaient été dénoncées par les inspecteurs du ministère de la Santé lors de précédentes visites de leurs installations. C’est le triste constat qui s’impose après un survol des rapports de visite des centres d’hébergement et de soins de longue durée de 2010 et 2011.

Par exemple, au Pavillon Alfred-Desrochers, à Montréal, le rapport fait état de « repas désorganisés », de « manque de respect envers les résidents », de « mépris » et « d’odeurs désagréables et persistantes ».

À la résidence Rive-Soleil, à Montréal, plusieurs chambres ne sont pas munies de toilette et les résidents affirment que « leur besoin d’élimination est brimé », alors qu’au Centre d’hébergement de Donnacona, « l’intimité des résidents n’est pas respectée » et des résidents « ont froid lors des soins d’hygiène ».

Ministre déçue

La ministre déléguée aux Services sociaux, Dominique Viens, juge inacceptables ces situations relevées par les inspecteurs, qui informent pourtant les centres de leur visite 24 heures à l’avance.
« Ce sont des comportements exécrables. Ça devrait être impeccable, point à la ligne, surtout lorsqu’on donne des soins à une clientèle si vulnérable », a commenté la ministre responsable.

Sans pouvoir l’expliquer, elle trouve « désolant » que des établissements n’apportent pas rapidement les correctifs nécessaires à la suite de rapports d’inspection défavorables.

« C’est dans la gouverne locale, au niveau des centres de santé et de services sociaux, et en dernier recours, à l’Agence régionale de santé. C’est là qu’il faut qu’il se passe quelque chose », a clamé Mme Viens, plaidant pour la responsabilisation des dirigeants régionaux.

« C’est à l’Agence de s’assurer que les correctifs soient apportés. Moi, je ne m’attends pas à moins que cela. Ça va tellement de soi que des comportements inacceptables ne devraient pas être tolérés », a ajouté la ministre.

Inspections

L’équipe des visites d’appréciation du ministère de la Santé est composée de seulement deux inspecteurs.

Toutefois, le nombre d’inspections a augmenté significativement en 2010-2011 par rapport à l’année précédente, passant de 54 à 88.

Malgré cet effort, les CHSLD de plusieurs régions du Québec n’ont pas été visités depuis 2008.

Le Centre de santé de Chibougamau, qui commandait pourtant des corrections « immédiates » parce qu’il entassait quatre résidents dans des chambres aux conditions d’hygiène « laissant à désirer », n’a pas été inspecté depuis le 7 avril 2004.

Consciente de l’existence de cas problèmes, Dominique Viens juge quand même que la plupart des établissements dispensent des soins de qualité et que son ministère a pris les moyens nécessaires pour éliminer les histoires d’horreur. « Nous avons augmenté les visites et nous faisons des gestes qui sont sévères pour assurer la sécurité des aînés », a-t-elle conclu.

LA FIN DES BILANS DE VISITE

Alors que le réseau présente des lacunes évidentes, le ministère de la Santé a choisi de ne plus produire de bilan national de ses visites d’inspection. Après des demandes répétées du Protecteur du citoyen, le ministère avait discrètement mis en ligne son premier rapport national couvrant la période 2004-2007.

On apprenait que plus de 50 % des 137 établissements visités présentaient une déficience dans l’accompagnement des activités d’élimination et que 47 % avaient « une grande part d’éléments à améliorer » quant à la qualité de la nourriture.

Or, plutôt que de produire un rapport du même type pour la période 2007-2010, le ministère a préféré préparer un bilan des mesures correctrices apportées, qui devrait être publié au cours des prochaines semaines.

« Honnêtement, je trouve ça pas mal plus pertinent », a défendu la ministre déléguée aux Services sociaux, Dominique Viens.

Selon elle, la situation a suffisamment évolué depuis l’implantation des visites d’appréciation, en 2003-2004, pour modifier l’approche de veille nationale. « Au début, peut-être qu’effectivement, c’était important d’avoir un bilan sur les constats et les observations faites, mais maintenant, nous cherchons plutôt à voir si les recommandations sont suivies », a-t-elle justifié.

Fermer les yeux

Au Parti québécois, la députée Carole Poirier accuse le gouvernement de fermer sciemment les yeux sur l’état du réseau des CHSLD, en abandonnant la publication d’un bilan des inspections. « Nous n’aurons plus de portrait global. C’est inquiétant, et tout ça, parce qu’ils ont peur des critiques », a commenté la porte-parole de l’opposition officielle pour les aînés.

Selon elle, Québec fait preuve d’un manque flagrant de transparence. « Elle est où la reddition de comptes d’un système public que nous payons tous. Est-ce qu’on peut savoir s’il répond aux besoins? » a martelé la députée Poirier.

Le député de la Coalition Avenir Québec Janvier Grondin a aussi qualifié d’inquiétante la décision du gouvernement.

 COMMENTAIRE DE PHILOMAGE

On peut se poser la question suivante : notre belle société québécoise possède-elle une culture générale qui respecte ses aînés, particulièrement ceux qui sont les plus démunis. 

Il est évident que les soins demandés par les personnes âgées en perte d'autonomie, souvent quasi totale, sont exigeants et même très difficiles à donner par le commun des mortels, et même pour du personnel très bien entraîné. Alors, il y a lieu de se demander quels incitatifs ou compensations ou récompenses ou motivations doit-on donner au personnel engagé quotidiennement dans ces tâches que l'on peut considérer comme extrêmes? La réponse est à la fois simple et compliquée : ce n'est pas tout le monde qui peut accomplir, jour après jour ces tâches et ceux qui le font doivent posséder des qualités humaines hors pair, que tout le monde ne peut avoir. 

La qualité des soins est fortement liée au choix du personnel qualifié et à une formation exemplaire, qui permet de relever ces défis permanents. Mettre en place au quotidien des accommodements raisonnables semble faire partie des solutions acceptables ou positives.

Personnellement, je n'ai pas de réponse toute faite d'avance face aux drames humains des personnes âgées, en perte d'autonomie, partielle ou totale. Cela ressemble beaucoup à du cas par cas, avec des balises pour ne pas tomber dans les extrêmes, lorsqu'il est question de soins personnels, d'alimentation, d'attention, de divertissements, etc.

RD

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