dimanche, juillet 04, 2010

 

Évolution du regard porté sur le divorce

Transposition pour le Web du travail de Mélanie Zeevaert

Introduction
Avant de tenter de répondre à cette question, il me semble important de définir le divorce. Au sens de notre droit actuel, le divorce est la rupture du mariage, prononcée par la justice, du vivant des époux. Il s'agit d'une dissolution complète et définitive du lien conjugal qui opère pour l'avenir. Actuellement, le droit de divorcer est reconnu à tous sans avoir à rabaisser nécessairement l'autre, ce qui n'a pas toujours été le cas. De même, la honte ressentie à l'idée de divorcer s'estompe de plus en plus, le divorce semble être une étape naturelle de la vie conjugale. Pour arriver à cette dédramatisation (positive ou négative selon l'avis de chacun) du divorce, il a fallu passer par de nombreuses étapes riches en remous.

Évolution du droit
Le droit romain
a connu et beaucoup pratiqué le divorce: les deux formes admises étaient celles du divorce par consentement mutuel et du divorce-répudiation; dans le premier cas, il est perçu comme une fin normale du mariage où le consentement mutuel défait ce qu'il a fait ; dans le second, il est la conséquence du pouvoir marital: à sens unique, il permet au mari de répudier sa femme. Mauvaise épouse ou mauvaise mère, une femme pouvait toujours se voir répudiée. On ne sait pas bien, par exemple, si dans la Chine ancienne la qualité de la nourriture était un motif de répudiation mais il semble que le bavardage des femmes en était un. Revenons-en au droit romain, celui-ci n'a pas seulement utilisé le divorce, il en a abusé.

Le christianisme fut sur ce point une réaction contre ces abus, et le concile de Trente, en 1563,
interdit le divorce, d'ailleurs aussi en réplique aux idées de la Réforme. L'Église, suivant la parole du Christ, croit à l'indissolubilité du mariage.
"Tout homme, dit Jésus, qui répudie sa femme et en épouse une autre commet un adultère, et celui qui épouse une femme répudiée par son mari commet un adultère". Cela explique les craintes des Chrétiens par rapport au divorce et au remariage.

Au XVIIIème siècle, des philosophes empreints de l'esprit des Lumières comme Montesquieu et Voltaire, se prononcent en faveur du divorce estimant que le maintien d'époux en discorde dans les liens du mariage est peu favorable à la fécondité et contraire à la nature humaine. Ce courant philosophique inspire la loi qui est promulguée le 20 septembre 1792, dont le préambule révèle à lui seul les ambitions de la réforme engagée: "la faculté de divorcer résulte de la liberté individuelle, dont un engagement indissoluble serait la perte". Cette loi envisage deux cas de divorce le divorce par consentement mutuel et le divorce pour faute.

Mais, à la Restauration en France, le catholicisme redevient religion d'État: la loi du 8 mai 1816, dite loi Bonald, supprime l'institution du divorce car l'indissolubilité du mariage prônée par l'Église devient règle d'État.


Le divorce ne sera rétabli qu'
en 1884 avec la célèbre loi Naquet. Le mariage doit pouvoir être résilié soit d'un commun accord, soit par la volonté de l'une des parties, si l'autre n'a pas rempli les conditions du contrat. L'idée de faute est donc toujours présente. Cette loi régira le divorce pendant presque cent ans. Les modifications subies entre temps sont mineures.

Au 20e siècle, les idées évoluent peu à peu. C'est ainsi que la loi du 11 juillet 1975 apporte des grands changements à l'institution. La modification du divorce s'inscrit dans un renouveau du droit de la famille. Le divorce tel qu'il résultait de la loi Naquet était essentiellement critiqué parce qu'il était entièrement fondé sur l'idée de faute, ce qui entraînait les époux soit à dramatiser leur conflit afin de noircir le plus possible l'adversaire ce qui à l'évidence était regrettable pour eux et surtout pour les enfants-, soit à créer de toutes pièces ce conflit grâce à une comédie judiciaire. Dédramatiser une situation hélas courante, éviter à la justice le ridicule de se voir la complice des fausses preuves, tels furent les objectifs majeurs de la réforme.

Conséquences de l'évolution des lois sur le regard de la société (et vice versa)
Toutes ces modifications subies par l'institution du divorce et les critiques et préjugés qui les ont entraînées ne sont pas sans conséquences sur l'image que la société et les divorcés eux-mêmes se font du divorce. Il n'y a pas si longtemps qu'un divorcé n'est plus réprouvé. L'image classique du divorce-jeu de massacre en faisait un irresponsable, un fou criminel, semant des victimes sur son passage: en tout état de cause, quelqu'un qu'on ne fréquentait pas. Il a longtemps fallu un certain héroïsme pour divorcer... ou s'y trouver acculé, sachant qu'on paierait fort cher, parfois toute sa vie, une liberté souvent médiocre. On se retrouvait seul, à moins de rencontrer un autre héros, une autre héroïne, susceptible de lier son sort à celui d'une bête galeuse. Seul, parce que l'Église interdit le remariage. Seul, parce que l'entourage s'esquive poliment. On devenait la honte de sa propre famille, les parents se voilaient la face devant leur fils ou fille divorcé. Cela se produit toujours actuellement dans certaines familles. Le divorce était une tare, quelque chose qui collait à la peau, qui vous fermait les portes des maisons convenables. Si un divorcé osait se montrer heureux, on parlait de lui à voix basse: "Ca peut s'attraper!". Les enfants des divorcés devinrent un sujet de recherche privilégié: ils étaient cancres, caractériels, délinquants et même suicidés! Les divorcés damnaient leurs enfants innocents. La dissolution familiale était la source même de tous les fléaux sociaux. Jusqu'à la loi de 1975, le divorce était un spectacle constitué de flots d'injures, de trahisons, de coups bas, d'enfants qu'on s'arrache..., ce qui ne faisait rien pour améliorer la situation des divorcés et de ceux qui envisageaient le divorce. Le divorce était égal à une sanction. Il fallait accuser son conjoint des pires torts, le seul moyen de défense était l'attaque. Le divorce est alors un acte de destruction, une négation totale de tout ce qui a pu être positif dans le mariage, une lutte âpre et sans pitié, qui s'appuie sur la haine.

La nouvelle loi est caractérisée par une volonté de "préserver" la famille. Elle a permis de faire apparaître une nouvelle image du divorce et des divorcés: ni " sanction", ni "constat d'échecs", mais, simplement, "choix de vie".

Maintenant, les divorcés et leurs enfants ne sont plus rejetés par la société car leur nombre augmente et le divorce n'apparaît plus comme un "crime". Il subsiste cependant chez les divorcés une vague de culpabilité, surtout s'ils ont des enfants, et ils ne peuvent pas s'empêcher de se justifier. On s'est tant acharné à dévaloriser les divorcés, dans une société qui prône le mariage, que les divorcés eux-mêmes ont tendance à oublier qu'ils sont porteurs de valeurs positives. Celui qui a décidé la rupture est anxieux, indécis. Pour l'autre, le fait d'être quitté réactive des terreurs primitives, celle du nouveau-né pour qui abandon signifie mort. La peur subsiste toutefois auprès des deux conjoints, peur de se retrouver seul. Les divorcés ne sont plus des écorchés vifs. Ils n'en sont pas moins des gens qui passent par une épreuve difficile et les réactions de l'entourage sont alors d'une importance capitale. Son rôle de soutien est très important. -Les parents, de la génération précédente, commencent à relativiser le divorce de leur enfant et peuvent alors lui apporter un soutien efficace. Par contre, rares sont les amis qui ont la patience d'écouter les difficultés des divorcés, c'est pourquoi de nombreux professionnels sont là pour encadrer les divorcés (psychologues...). Presque tous les divorcés se sont plaints de l'isolement qui a été leur lot aux moments les plus durs et de leurs difficultés de trouver une écoute.

Après tous les maux dont les enfants de parents divorcés ont été affublés, une étude réalisée en 1974 démontre que les enfants de couples séparés se portent mieux, dans l'ensemble, que les enfants dont les parents vivent au foyer une vie conflictuelle. Cependant, il ne faut pas nier tout effet sur l'enfant. Ainsi, l'enfant qui assiste aux conflits de ses parents divorcés et qui n'ose pas en parler s'isole de la communauté enfantine. Néanmoins, en classe, l'enfant de parents divorcés n'est plus marginal, le sujet n'est plus tabou. L'enfant, moins protégé, est aussi moins fragile. Il a souvent une maturité au-dessus de la moyenne. Il y a aussi les enfants pour qui l'annonce du divorce est une bonne nouvelle même s'ils ne le diront jamais ouvertement. Certains détestent un de leurs parents pour diverses raisons et sont heureux de le voir partir. L'impact le plus important constaté par les psychologues sur ces enfants est au niveau du comportement: ils vivent des mouvements contradictoires, où alternent propos de sang-froid, évaluation souvent très juste de la réalité, et des crises de sensibilité profonde, parfois inexprimable. Il faut donc tenir compte de ces deux niveaux de réactions, l'un très infantile et l'autre, très mûr.

Des psychologues ont aussi souligné l'impact des nouvelles formes de familles sur l'enfant. L'enfant issu d'une famille monoparentale a parfois plus de difficultés qu'un autre à prendre le large pour construire sa propre vie à cause du lien fort et exclusif qu'il a avec le parent qui en a la garde. Les familles recomposées peuvent être à l'origine d'un épanouissement favorable à l'enfant. De plus, elles évitent au parent qui a la garde de l'enfant de se reposer uniquement sur lui.

En conclusion, après le sentiment de rejet et d'anormalité dont ont été victimes les divorcés et leurs enfants pendant très longtemps, nous arrivons dans une période où ceux-ci sont aidés à s'intégrer dans la société par des analyses psychologiques, sociologiques... où on tente de comprendre leurs réactions afin de leur permettre de mieux se comprendre et de mieux être compris. À une phase d'exclusion succède donc une phase d'acceptation avec aide et intégration.

Bibliographie

Claude COLOMBET, Divorce, Encyclopédie Universalis, DVD, version 7.
Encyclopédie Encarta, Microsoft Corporation.
Livres
Claire GARBAR et Francis THEODORE, Les familles mosaïques, éditions Nathan, Paris, 1991.
Jean- Jacques GUILLARME, Philippe FUGUET, Les parents, le divorce et l'enfant, éditions ESF, Paris, 1985.
Catherine RAGER, Le temps du divorce, collection "L'école des parents", éditions Casterman, Tournai, 1982.
Syllabus de "Droit civil: droit des personnes" de Monsieur LHOEST, ESAS, 2001-2002.
Articles
Arlette LEBIGRE, La longue marche du divorce, Les collections de l'histoire, n° 63, janvier 1984.
Arlette LEBIGRE, La Révolution du divorce, Les collections de l'histoire, Hors série n°5, L 'amour et la sexualité, p. 76-77.
Sites
http://www.cssr net/repchret/francais/volume1/mariage/&4divors. htm (12.01.02.)
http://www notaire~be/info/divorces/3 32 remariage_apres_divorce.htm (12.01.02.)

COMMENTAIRE DE PHILOMAGE

On voit, de façon évidente, les dommages ou les conséquences que peuvent amener des positions morales et sociales comme le mariage indissoluble que l'Église catholique impose toujours, quand le contexte le lui permet. Il en est de même aussi des enfants nés hors mariage qui ont longtemps été perçus comme des bâtards, des enfants rejetés ou encore les filles-mères qui, au Québec, avaient le choix de se faire avorter en cachette ou de donner leur enfant en adoption. Sinon, ces jeunes personnes étaient stigmatisées à vie dans leur propre village ou quartier, en plus des drames psychologiques suite à un avortement.

Il y a lieu de se demander si l'Église catholique est en droit de s'opposer au mariage GAI, même si personnellement, je ne suis pas impliqué dans cette problématique. La question de l'avortement est plus controversée puisqu'il s'agit d'une nouvelle vie, d'un foetus qui n'a pas encore de droits reconnus.

L'euthanasie et le droit au suicide assisté sont aussi des sujets contemporains sur la sellette. Parce que la prolongation de la vie grâce à la médecine et aux meilleures conditions de vie va amener nombre de personnes de partout dans le monde à s'interroger sur l'à-propos de leur fin de vie.

Je pousserais mon interrogation plus loin en me demandant si l'on a besoin vraiment de telles contraintes morales? Que ce soit l'Islam, le Catholicisme ou le Judaïsme, ces religions ont toutes des codes de moralité qui empêchent l'homme et la femme du XXIe siècle de s'épanouir pleinement, en toute liberté et de développer des comportements vraiment « humains ».

RD

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