vendredi, août 24, 2012

 

Cohabiter pour mieux vivre

 Article de René Laurin, Journal de Québec, 24 août 2012

Le concept de cohabitation comme celui que Cohabitat veut développer au Québec est implanté depuis plus de 40 ans dans les pays scandinaves.

Avons-nous vraiment besoin de ces belles grosses maisons de banlieue avec chacune son petit jardin botanique privé pour vivre heureux en compagnie de ceux qu’on aime ? Et si toutes ces possessions n’étaient qu’un immense boulet à traîner, une illusion de bonheur qui nous asservit et nous isole les uns des autres au lieu de nous procurer le bien-être tant souhaité ?

Il y a un an, Sonia Tremblay et son conjoint ont décidé qu’ils en avaient assez de passer autant de temps à entretenir leur grand terrain. Ils ont mis en vente leur maison de Sillery, en banlieue de Québec, pour tenter l’aventure de la cohabitation avec leurs deux enfants de 4 et 7 ans. En juin 2013, ils devraient emménager dans l’une des 42 unités de logement intégrées au premier ensemble québécois d’habitats de type cohousing, ou cohabitat.

« Nous vivons dans une belle grande maison avec un grand terrain, mais il n’y a pratiquement pas d’enfants dans le quartier. Nos garçons s’ennuient. Ils n’ont pas d’amis avec qui jouer », m’a expliqué Sonia. Lorsqu’ils ont entendu parler du projet de cohabitation du quartier Saint-Sacrement, à Québec, ils se sont tout de suite sentis interpellés.

Rien à voir avec les communes

Comme tout le monde, ils ont eu des réticences. Pas question pour eux d’embarquer dans un projet qui ressemble de près ou de loin aux communes des années 1970. Ils ont assisté à quelques rencontres et ont aussitôt été rassurés par la qualité des participants et leurs valeurs. Tous ont à cœur de préserver leur intimité, mais ils souhaitent en même temps vivre dans un environnement agréable, respectueux de l’environnement, où il sera possible d’échanger des services, de socialiser en bonne compagnie, de partager des biens et des corvées (entretien du terrain et des bâtiments, partage de voitures, etc.), d’organiser des repas communs à l’occasion.

Le projet de Québec regroupera des gens de tous les âges : des retraités, beaucoup de jeunes familles avec enfants (28 à ce jour), des familles monoparentales et des professionnels sans enfants qui cherchent à se sortir de leur isolement en dehors du travail.

« Chaque rencontre de planification est une fête pour nos enfants, raconte Sonia. Ils ont toujours hâte de retrouver leurs nouveaux amis. C’est comme si nous leur offrions une grande famille. Pour nous, c’est rassurant. Vivre en groupe demande beaucoup moins de supervision parentale. »

Là-bas, ils bénéficieront d’une grande cuisine communautaire où ils auront la possibilité de partager le fardeau des repas à tour de rôle. Au retour du travail, les parents pourront socialiser dans la grande salle commune et prendre un verre de vin pendant que les enfants s’amusent ensemble dans la salle de jeu isolée par un mur de verre. On a aussi pensé à aménager un atelier commun pour les bricoleurs et on songe déjà à la future pièce insonorisée qui permettra aux ados de mettre sur pied leur propre band de garage sans casser les oreilles de leurs parents.

Créer un village en ville

La beauté du cohabitat, selon elle, c’est qu’il permet de reproduire en ville le modèle des villages d’autrefois tout en vous donnant la possibilité de choisir votre milieu de vie et votre voisinage. Personne n’est exclu sans raison valable, assure-t-elle. Il faut simplement se sentir à l’aise avec les valeurs véhiculées par l’ensemble des participants et, bien sûr, avoir les moyens de se payer une maison au prix courant du marché.

Mme Tremblay rappelle toutefois que le groupe d’habitations qu’ils ont choisies est certifié Leed, ce qui permet, à long terme, de réaliser des économies d’énergie. La vie en commun permet aussi de réduire les frais de gardiennage, d’entretien, de transport, de loisirs, de nourriture (achat en commun en grosses quantités), etc.

Un beau rêve tout cela ? Et si c’était au contraire la solution que nous cherchons tous à notre mode de vie devenu complètement fou ? Ce concept d’habitation est implanté dans les pays scandinaves depuis plus de 40 ans et continue de se développer. Matthieu Lietaert, docteur en politique et spécialiste en cohabitat, rappelle que 500 projets sont en développement au Danemark. Les États-Unis en comptent 150 et 150 autres sont en développement. « Bien sûr, il y a des échecs, note l’auteur du livre Le cohabitat – Reconstruisons des villages en ville, mais beaucoup fonctionnent très bien et ont de longues listes d’attentes. »

Ce style de vie ne convient pas à tout le monde, admet M. Lietaert, mais beaucoup de familles ont atteint une limite en termes de temps et d’argent disponible. Le coût de la vie explose partout, le stress devient intenable et la planète souffre de nos abus. Vu sous cet angle, le cohabitat peut devenir une solution pour beaucoup de gens si nous voulons bien accepter d’apprendre à communiquer et à vivre ensemble.

À lire absolument : Le cohabitat – Reconstruisons des villages en ville, éditions Couleur Livres, 2012 Le projet cohabitat Québec ici : http://cohabitat.ca/

RD





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