samedi, mars 01, 2014

 

Le Québec, un État à bout de souffle et de plus en plus dépendant d'Ottawa




 VOICI UNE ANALYSE DE LA SITUATION ÉCONOMIQUE DU QUÉBEC, SUITE AU DÉPÔT DU BUDGET MARCEAU ET PRÉCÉDANT DE PEU LA PROCHAINE CAMPAGNE ÉLECTORALE
 
Article de Jean-Paul Gagné, Journal Les Affaires, 1er mars 2014

Même si le deuxième budget du ministre Nicolas Marceau est mort-né en raison d'un rendez-vous électoral immiment, il s'avère instructif sur le plan budgétaire.


Oublions les petits engagements, qui ne survivront peut-être pas au budget que présentera le prochain gouvernement, et regardons les enjeux financiers de l'État et les stratégies présentées pour les respecter.

Premier constat, le gouvernement n'a pas de marge de manoeuvre réelle. Malheureusement, cette situation n'a pas empêché le gouvernement Marois d'annoncer en 44 jours des engagements de 2,1 milliards de dollars, selon une compilation de La Presse. Un geste irresponsable ? Certainement en partie, puisque des subventions sont destinées à acheter des votes, alors que d'autres appuient des projets discutables (comme la cimenterie).

Le gouvernement contrôle plutôt bien la croissance de ses dépenses, malgré la hausse annuelle prévue de 2 % des dépenses liées aux programmes pendant trois ans ; mais il y a une limite à ce qui peut être ajouté. Dans l'ensemble canadien, le Québec est de loin le plus généreux à l'égard de ses citoyens : droits de scolarité les plus bas, programme de garderie à 7 $/jour, assurance-médicaments universelle, congés parentaux universels d'un an, etc. Même les provinces les plus prospères ne se considèrent pas assez riches pour en offrir autant à leurs citoyens.

Le panier de programmes sociaux du Québec serait peut-être finançable si la croissance de son économie était forte. Or, celle-ci est anémique, ce qui nuit aux rentrées fiscales.

Une solution simpliste serait de vouloir accroître encore les impôts, comme a tenté de le faire le ministre Nicolas Marceau en octobre 2012. Il a dû reculer quant à son projet de hausser fortement et rétroactivement le taux marginal de l'impôt sur le revenu et des impôts sur les dividendes et les gains en capital. Après un débat musclé avec les milieux d'affaires, il a abandonné la rétroactivité, a fait passer de 24 % à 25,75 % le taux marginal maximum d'impôt sur le revenu et a porté de 200 $ à 1 000 $ la contribution santé pour les plus fortunés. Puisque les Québécois sont déjà de loin les plus taxés du Canada, ce serait encourager l'exode des plus riches que d'accroître les impôts payés par les particuliers.

Il n'y a pas davantage de marge du côté des entreprises, puisque celles-ci investissent déjà trop peu pour accroître leur productivité. Il faudrait au contraire réduire leur fardeau fiscal si on veut qu'elles agissent sur ce plan.

Peut-on attirer davantage d'investisseurs de l'extérieur ? Nous avons des ressources, une main-d'oeuvre instruite, des systèmes d'éducation et de santé de bonne qualité. Nous sommes créatifs, démocratiques et pacifiques.

Malheureusement, nous ne sommes pas assez accueillants. Les lois de la ministre Martine Ouellet sur l'activité et la fiscalité minières ont créé de l'incertitude et envoyé à l'industrie des messages inhospitaliers. Quand un investisseur norvégien nous dit qu'il préfère investir en Afrique («ils veulent exploiter leurs ressources, eux») plutôt qu'au Québec, cela en dit long sur l'image qu'on projette. Les projets de loi inutiles sur la langue (mis de côté pour le moment) et le port de signes religieux sont des irritants non négligeables pour des dizaines de milliers de personnes. L'indépendance du Québec, que propose toujours le Parti québécois malgré deux échecs référendaires, est une d'épée de Damoclès pour un fort pourcentage de la population.

Même si on reconnaît que la concurrence internationale en matière d'investissements est très vive, on se refuse à admettre que le capital est très frileux et très mobile. Pourtant, ce dernier a besoin de stabilité et d'un climat prévisible.

La position du gouvernement sur le pétrole sera interprétée favorablement. La hausse des tarifs des garderies à 9 $ en deux ans et leur indexation par la suite sont aussi de bons signaux.

Déficit structurel

En 2014-2015, le gouvernement en sera à sa sixième année consécutive de déficit et rien ne dit que la prévision d'un retour à l'équilibre en 2015-2016 est réaliste, puisqu'il y aura alors un écart de 530 millions de dollars à résorber. Il n'entre plus assez de revenus dans les coffres de l'État pour les choix de sociétés qu'il nous a imposés. Attendons-nous à des avertissements désagréables de la part des agences de notation de crédit.

Autre vérité difficile à entendre, le fédéral a fourni cette année 24 % des revenus du gouvernement du Québec, soit une somme de 16,7 G$, en hausse de 6,1 % sur l'année précédente.

La dette brute du gouvernement croîtra de 7 G$ à 206 G$ en mars 2014, alors qu'elle représentera 54,4 % du PIB du Québec. Les frais de 8,6 G$ sur cette dette sont tolérables grâce à la faiblesse des taux, mais préparons-nous à vivre un moment de vérité quand ceux-ci monteront.

Voilà des enjeux qui mériteront d'être débattus lors de la prochaine campagne électorale.

 RD





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