lundi, mai 26, 2014
Un risque financier sournois guette nos aînés
Article de FABIEN MAJOR, Journal de Québec, 22 mai 2014
Gérer soi-même ses finances peut paraître compliqué. Imaginez pour un aîné en perte d’autonomie.
Parmi les nombreux défis de la retraite, il y en a un qui est rarement abordé: l’aptitude à gérer soi-même son budget et ses épargnes retraite. Le risque de défaillance de sa capacité de raisonnement est bien réel. Les pertes de mémoire, la démence et l’Alzheimer peuvent précipiter rapidement les aînés dans la pauvreté. Comment? Par une succession de mauvaises décisions financières.
Le siège de nombreuses fonctions cognitives impliquées dans les choix financiers est situé dans la partie frontale du cortex cérébral. Le dysfonctionnement de cellules nerveuses joue sur notre capacité d’exécuter et de planifier des tâches, de s’adapter aux changements et de prendre des décisions pertinentes. En vieillissant, nous avons de plus en plus de difficultés à contenir les émotions primaires jouant sur la peur et l’excitation de gagner. Mettre des informations clefs dans leurs contextes devient alors très pénible. À partir de 70 ans, nos compétences financières et notre capacité à gérer le risque se détériorent en accéléré.
Finances négligées
Lorsqu’on s’est aperçu que mon père n’était plus le même, il pouvait poster trois fois un même chèque à Hydro-Québec, mais il omettait de payer ses impôts. Son système budgétaire était devenu un fouillis indescriptible. La perte d’autonomie dans sa gestion financière ou d’activités comme le choix de vêtement caractérise le stade 5 du degré d’avancement de la maladie d’Alzheimer. Il n’est rien arrivé de bien grave à mon paternel. Ses cinq enfants l’ont bien entouré, mais toutes les personnes âgées n’ont pas cette chance.
Plus on vieillit, plus on devient vulnérable à la fraude et aux pressions sournoises des «vendeurs» sans scrupule. Avez-vous déjà remarqué comment une personne âgée en perte partielle de jugement se comporte devant le commis d’une boutique? Elle n’a pas de résistance. Le mois dernier j’ai vu une belle mamie sortir du magasin d’informatique avec sous le bras un ordinateur portable de 3500 $. Elle cherchait un appareil pour communiquer avec sa petite fille sur Facebook. Un modèle à 400 $ aurait bien fait le boulot, mais le vendeur dépourvu d’éthique y a vu l’occasion de gonfler ses commissions.
Ce genre de situation se reproduit également avec les produits et services financiers. Sous la pression, des grands-parents vont modifier leur testament, changer les bénéficiaires de leurs polices d’assurance, vendre une propriété secondaire en catimini ou souscrire à des placements non rachetables. L’employé de la banque, le comptable ou le notaire pourra bien plaider de la légalité de ces transactions, mais elles sont certes inappropriées.
Si vous avez toutes vos capacités, vite nommez une personne de confiance comme mandataire en cas d’inaptitude. Si vous avez peu de temps ou d’intérêt pour la gestion de portefeuille, les fonds de placement ayant un cycle de vie, les rentes variables à versements prévisibles sont préférables aux titres individuels.
COMMENTAIRE DE PHILOMAGE
Difficile de tout prévoir dans la vie. Il est évident qu'en vieillissant, certains d'entre nous perdront leur capacité de s'auto-gérer, sur tous les plans, y compris sur le plan financier.
Ce qu'il faut retenir avant tout, ce sont les signes avant-coureurs qu'une personne manifeste dans son entourage familier, soit ses parents, fils ou filles ou encore ses amis. C'est à ce moment-là qu'il faut être très attentif dans ses démarches et prendre les moyens qu'il faut pour choisir la bonne personne comme mandataire en cas d'inaptitude.
Par ailleurs, dans tout cafouillis financier, l'important, c'est la sécurité et le bien-être de la personne âgée. Quand on ne se contrôle plus ou que l'on doive demander de toute urgence de l'aide de ses proches, le sort de notre fortune n'a plus d'importance, sauf si elle doit concourir à notre mieux-être en fin de vie. Après le décès, l'État se chargera bien du reste.
RD