mercredi, février 21, 2007
La situation des gens âgés au Canada (4) : Conséquences du vieillissement de la population.
UN REPORTAGE DE RADIO-CANADA.CA datant de Février 2002
Titre de l’article : « Le Canada prend des rides »
Réalisé par la journaliste: Florence Meney
Source de l’information :
http://www.radio-canada.ca/nouvelles/dossiers/vieux/consequences.html
Conséquences du vieillissement de la population
Pourquoi, lorsqu'on évoque le vieillissement de la population, parle-t-on immanquablement des scénarios sombres, des lendemains difficiles, des coûts incommensurables pour notre société? Le pouvoir gris qui prend forme et se structure en notre sein est une réalité tangible; certes, le vieillissement de la population nous forcera à nous regarder, à réexaminer nos modes de fonctionnements, nos politiques et nos mentalités. Mais l'émergence d'une force mature, avec son bagage et sa sagesse, ne peut-elle être vue comme un apport précieux plutôt qu'une calamité?
Vers un changement des mentalités?
Pour le sociologue Jean Carette, qui se consacre à ces questions depuis 25 ans, le vieillissement de la population est une bonne nouvelle pour nous tous. « Un enfant coûte cher, socialement parlant, dit le sociologue. Pendant 20 ans, il faut investir en lui, tandis que les gens âgés ont déjà payé, et majoritairement, ce sont eux qui possèdent le capital. Le vieillissement est un acquis extraordinaire de la société. »
« J'ai 60 ans. Il y a 200 ans, je serais mort. Aujourd'hui, je continue à apporter des choses à la société, et pas uniquement économiquement. En avançant en âge, nous prenons une densité, comme un vin quand il est bon. »
Malheureusement, selon l'expert, la société nous fait perdre notre importance quand nous vieillissons. On souffre beaucoup d'âgisme contre les vieillards. Ce rejet n'est pas facile à enrayer, selon le sociologue, car la société ne perçoit les individus que par leur capacité à gagner de l'argent. Les civilisations précédentes respectaient les individus au-delà de leur dimension économique, ce qui n'est plus guère le cas, d'après Jean Carette.
Les impôts, les retraites :
D'un côté moins optimiste, le système de retraite est confronté à un défi majeur, lié au contexte démographique dans lequel l’espérance de vie s’allonge et les générations nombreuses de l’après-guerre vont partir à la retraite.
« Au Québec, il y a 2000 prises de retraite par semaine à un âge moyen de 58 ans. Sur ces 2000 personnes, la moitié ne sait pas qu'ils prennent leur retraite. Ils tombent au chômage et espèrent revenir sur le marché du travail. Ils traînent jusqu'à 65 ans. »- Jean Carette
Le vieillissement rapide de la population aura un impact sur les finances publiques et sur l'équilibre budgétaire des gouvernements. Le ratio de la population qui supporte la majorité des charges sociales, à savoir les gens de 20 à 64 ans, passera de cinq pour un à deux pour un d'ici le milieu du 21e siècle. La base fiscale de l'État se trouvera réduite d'autant, avec des conséquences pour les services sociaux. Par contre, le vieillissement fera baisser le coût de certains programmes, comme ceux d'Éducation.
Aurons-nous assez d'argent pour nos retraites?
Une enquête récente de Statistique Canada montre que plus de 1,5 million de ménages canadiens dont le chef de famille a 45 ans ou plus ne contribuent pas à une caisse de retraite privée. Ces Canadiens devront donc compter sur les retraites gouvernementales ainsi que sur les épargnes qu'ils auront pu accumuler d'ici la retraite. Le problème est qu'une faible minorité de gens achètent suffisamment de REER pour s'assurer un niveau de vie comparable à celui de la vie active. Cependant, bien des experts précisent qu'après la retraite, les besoins et dépenses diminuent sensiblement.
Le concept de retraite payée par l'État est relativement nouveau : le gouvernement
canadien verse des pensions depuis 1921. Il fallait alors être âgé de 70 ans pour y avoir droit. Le Régime de pensions du Canada, qui a réduit l'admissibilité à 65 ans, a été établi en 1966. L'avenir du régime québécois des rentes est assuré.
L'impact sur la santé :
On n'entend que cela, on ne lit que cela : le coût de la santé augmente à une vitesse effarante. Les dépenses totales des Canadiens ont franchi en 2001 la barre psychologique des 100 milliards de dollars. Et bien entendu, une partie de cette augmentation est imputable aux soins exigés par une population vieillissante.
Avec l'âge, nous utilisons de plus en plus les services de santé. Avant 65 ans, la dépense publique annuelle en santé et en services sociaux était inférieure à 2000 $. À 65 ans, ce montant se chiffre à 6000 $, pour passer à 10 000 $ à 80 ans et à 16 000 $ après 85 ans. Avec un peu d'ironie, on pourrait dire qu'en atteignant son but, à savoir nous garder en vie le plus longtemps possible, la médecine crée son propre problème, car plus nous vivons longtemps, plus nous pesons lourd sur le système.
À partir de 55 ans, les hommes ont davantage recours aux services de santé que les femmes. Mais à partir de la soixantaine, le coût de la santé grimpe de façon spectaculaire pour les deux sexes.
Au Québec, par exemple, la proportion du produit intérieur brut consacrée à la santé et aux services sociaux pourrait passer de 7 % en 1998 à 15 % en 2050. Ce poids sur le système de santé ira en s'accroissant au fur et à mesure que la génération des baby-boomers deviendra, elle aussi, âgée.
Cette crise du système de santé face à une population vieillissante a été mise en évidence à plusieurs reprises, que ce soit au Québec dans le cadre de la Commission d'étude sur les services de santé et les services sociaux (commission Clair) ou, tout récemment, par le rapport intérimaire déposé par Roy Romanow, chargé d'une commission royale sur la réforme du système de santé.
Les baby-boomers sont responsables de plus de la moitié de l'augmentation des visites chez les médecins canadiens en 1999 :
Selon des chiffres de IMS HEALTH, les Canadiens âgés de 40 à 59 ans ont été responsables de 52 % des 22 millions de visites supplémentaires effectuées dans les cabinets de médecins en 1999. Ces chiffres donnent une idée du défi prévisible que pose le vieillissement de cette génération.
Des maladies les plus diagnostiquées, l'hypertension artérielle est celle qui a connu la plus forte augmentation.
Taux d'hospitalisation des personnes âgées au Canada :
Elles sont trois fois plus susceptibles d'être hospitalisées que les plus jeunes. L'hospitalisation est aussi beaucoup plus longue.
Selon des données récentes de l'Institut canadien d'information sur la santé, on constate que le secteur public assume toujours une grande majorité des dépenses de santé. Le Canada et la France se situaient, en 1998-1999, au 3e rang des pays du G-7 en ce qui concerne l'importance des ressources consacrées à la santé. Par contre, le Québec est l'une des provinces qui consacre le moins d'argent par habitant pour soigner la population. Les changements démographiques poussent le gouvernement à chercher des solutions pour un avenir qui, sinon, promet d'être difficile.
« C'est certain qu'on a des choix à faire, ce qui n'était pas le cas avant, parce que les gens mourraient. Mais c'est une question de débat de société. »- Jean Carette
Des questions d'éthique et de prévention :
Qui décidera quel montant investir pour prolonger la vie de quelqu'un de très malade, de très âgé, de quelques jours ou de quelques semaines? Si la majorité des personnes âgées peuvent demeurer autonomes et en bonne santé longtemps et ne connaître qu'une courte période de maladie à la fin de leurs jours, le système de santé pourra sans doute trouver en lui-même des solutions, d'où l'importance de la prévention des maladies.
Par exemple, chez les plus de 75 ans, les simples chutes tuent deux fois plus que les meurtres, les suicides et les accidents d'auto combinés. Souvent, ces chutes peuvent être évitées.
Les médicaments les plus prescrits aux personnes âgées :
Les analgésiques, les médicaments contre l'hypertension artérielle, les médicaments pour le cœur et l'estomac.
Cependant, il ne faut pas dramatiser :
Selon François Béland, spécialiste dans le domaine du vieillissement et des soins de santé à l'Université de Montréal, la société peut bel et bien préparer son système de santé pour qu'il puisse faire face au vieillissement de la population. Au Québec en particulier, selon l'expert, les instruments nécessaires sont déjà en place, et ce n'est en fait qu'une question de volonté, un débat public. « Nous avons 20 ans pour réagir, il n'est pas trop tard », déclare-t-il. Certes, concède M. Béland, les coûts de santé vont augmenter, mais pas de façon si faramineuse. La société peut faire face à ces coûts, si elle admet le principe de hausses d'impôts et de taxes pour répondre aux nouvelles exigences. Par ailleurs, selon M. Béland, il faut absolument dissiper le mythe qui veut que le secteur privé puisse mieux répondre que l'État aux besoins grandissants en santé. Il explique que la société finit toujours par payer la note, que ce soit en passant par des services de soins privés ou par des services publics, et que l'État est mieux à même de gérer le système. « Au bout du compte, dit-il, tout est une question de redistribution de la richesse. Les plus vulnérables, soit les plus pauvres, les plus âgés, utilisent plus les services de santé, mais les plus riches doivent accepter de financer les services utilisés par tous. »
Le spécialiste constate que le gouvernement du Québec tarde à prendre la situation en main. À la suite du rapport de la commission Clair, qui selon M. Béland mettait de l'avant des pistes de solution intéressantes, Québec ne bouge guère et attend le rapport fédéral Romanow, tout en martelant le fait que la santé relève du provincial. Parmi les pistes relevées dans le rapport Clair, M. Béland évoque la mise en place de groupes de médecine familiale, mais aussi et surtout celle de sections de réseaux intégrés destinés aux personnes âgées. Le principe : accorder un budget global à une entité chargée d'administrer toute la gamme de services destinés à cette clientèle, de l'hébergement à l'hospitalisation et aux soins à domicile, en passant par les médicaments. Selon lui, ce système serait beaucoup plus rationnel et efficace.
Un monde du travail en révolution :
Plus le nombre de personnes âgées augmente par rapport aux jeunes, moins le nombre de gens cotisants aux régimes de retraite divers est élevé. L'une des conséquences directes : il sera bientôt révolu le temps où l'on prenait sa retraite à 50, 55 ans. D'une part parce que le système n'aura pas les moyens d'assurer à tous une retraite longue et dorée, d'autre part parce qu'on aura une pénurie de main-d'œuvre et qu'il faudra garder les travailleurs déjà en place.
La Société québécoise de psychologie du travail et des organisations parlait de ce danger à l'automne 2001 en faisant porter son colloque annuel sur l'impact de l'arrivée massive à la retraite des baby-boomers. Parmi les conséquences qui se profilent à l'horizon, on retrouve le problème du manque de relève pour combler les postes laissés vacants par les nouveaux retraités. Dans une telle situation, on risque aussi de briser le lien entre les employés plus âgés et les nouveaux, et de perdre ainsi l'expérience acquise. La SQPTO constate qu'il faut de toute urgence planifier cette transition pour éviter un épisode traumatisant, comme celui du départ en masse des infirmières au sein du système de santé québécois, mais à plus grande échelle.
La fonction publique : d'ici dix ans, au Québec, plus de 40 % des employés permanents de la fonction publique provinciale auront soit pris leur retraite, soit démissionné, ou seront simplement morts. On parle ici d'une main-d'œuvre majoritairement francophone. Ces départs pourraient alors amorcer une révolution dans la composition linguistique et culturelle de la fonction publique, selon qui remplacera ces employés.
Quelques données pour la fonction publique québécoise :
- Aucun haut fonctionnaire n'a moins de 35 ans.
- La moyenne d'âge des cadres supérieurs est de 51 ans.
- La moyenne d'âge de la direction est de 52 ans.
Dans le secteur privé, on retrouve les mêmes tendances. Selon le Conseil du patronat du Québec, beaucoup d'entreprises devront remplacer jusqu'à la moitié de leur main-d'œuvre d'ici dix ans. Dans un article paru dans le quotidien Le Devoir, le président du CPQ, Gilles Taillon, explique que le déclin démographique aura un impact négatif sur la capacité de la société québécoise d'assurer sa croissance économique et sa prospérité.
Face à cette perspective, le défi des entreprises sera de fidéliser ses employés pour les garder le plus longtemps possible. On se tourne aussi vers l'importation de « sang neuf » ou de « cerveaux neufs » venus de l'étranger.
Un monde du travail moins sécurisant : la disparition graduelle de l'État-providence aura non seulement des effets sur les services sociaux et de santé, mais changera les règles sur le marché du travail. Selon la sociologue Hélène David, du groupe de recherche sur les aspects sociaux de la santé et de la prévention de l'Université de Montréal, on connaîtra ainsi une déréglementation du marché du travail avec une dérégulation des salaires et un affaiblissement de la protection au travail, ainsi qu'un alourdissement des tâches. Bref, un monde du travail plus sauvage, plus éreintant.
Dernier commentaire :
C'est dans ce monde en mouvance que je débute ma retraite. Qu'est-ce qui m'attend réellement? Je ne le sais pas. Un grand nombre d'inconnus sont devant moi. C'est le cas aussi pour tous ceux qui se voient rendus à cette période de leur vie, que l'on assimile généralement à une période de repos, de contemplation ou de réflexion et de loisirs en permanence.
RD
Titre de l’article : « Le Canada prend des rides »
Réalisé par la journaliste: Florence Meney
Source de l’information :
http://www.radio-canada.ca/nouvelles/dossiers/vieux/consequences.html
Conséquences du vieillissement de la population
Pourquoi, lorsqu'on évoque le vieillissement de la population, parle-t-on immanquablement des scénarios sombres, des lendemains difficiles, des coûts incommensurables pour notre société? Le pouvoir gris qui prend forme et se structure en notre sein est une réalité tangible; certes, le vieillissement de la population nous forcera à nous regarder, à réexaminer nos modes de fonctionnements, nos politiques et nos mentalités. Mais l'émergence d'une force mature, avec son bagage et sa sagesse, ne peut-elle être vue comme un apport précieux plutôt qu'une calamité?
Vers un changement des mentalités?
Pour le sociologue Jean Carette, qui se consacre à ces questions depuis 25 ans, le vieillissement de la population est une bonne nouvelle pour nous tous. « Un enfant coûte cher, socialement parlant, dit le sociologue. Pendant 20 ans, il faut investir en lui, tandis que les gens âgés ont déjà payé, et majoritairement, ce sont eux qui possèdent le capital. Le vieillissement est un acquis extraordinaire de la société. »
« J'ai 60 ans. Il y a 200 ans, je serais mort. Aujourd'hui, je continue à apporter des choses à la société, et pas uniquement économiquement. En avançant en âge, nous prenons une densité, comme un vin quand il est bon. »
Malheureusement, selon l'expert, la société nous fait perdre notre importance quand nous vieillissons. On souffre beaucoup d'âgisme contre les vieillards. Ce rejet n'est pas facile à enrayer, selon le sociologue, car la société ne perçoit les individus que par leur capacité à gagner de l'argent. Les civilisations précédentes respectaient les individus au-delà de leur dimension économique, ce qui n'est plus guère le cas, d'après Jean Carette.
Les impôts, les retraites :
D'un côté moins optimiste, le système de retraite est confronté à un défi majeur, lié au contexte démographique dans lequel l’espérance de vie s’allonge et les générations nombreuses de l’après-guerre vont partir à la retraite.
« Au Québec, il y a 2000 prises de retraite par semaine à un âge moyen de 58 ans. Sur ces 2000 personnes, la moitié ne sait pas qu'ils prennent leur retraite. Ils tombent au chômage et espèrent revenir sur le marché du travail. Ils traînent jusqu'à 65 ans. »- Jean Carette
Le vieillissement rapide de la population aura un impact sur les finances publiques et sur l'équilibre budgétaire des gouvernements. Le ratio de la population qui supporte la majorité des charges sociales, à savoir les gens de 20 à 64 ans, passera de cinq pour un à deux pour un d'ici le milieu du 21e siècle. La base fiscale de l'État se trouvera réduite d'autant, avec des conséquences pour les services sociaux. Par contre, le vieillissement fera baisser le coût de certains programmes, comme ceux d'Éducation.
Aurons-nous assez d'argent pour nos retraites?
Une enquête récente de Statistique Canada montre que plus de 1,5 million de ménages canadiens dont le chef de famille a 45 ans ou plus ne contribuent pas à une caisse de retraite privée. Ces Canadiens devront donc compter sur les retraites gouvernementales ainsi que sur les épargnes qu'ils auront pu accumuler d'ici la retraite. Le problème est qu'une faible minorité de gens achètent suffisamment de REER pour s'assurer un niveau de vie comparable à celui de la vie active. Cependant, bien des experts précisent qu'après la retraite, les besoins et dépenses diminuent sensiblement.
Le concept de retraite payée par l'État est relativement nouveau : le gouvernement
canadien verse des pensions depuis 1921. Il fallait alors être âgé de 70 ans pour y avoir droit. Le Régime de pensions du Canada, qui a réduit l'admissibilité à 65 ans, a été établi en 1966. L'avenir du régime québécois des rentes est assuré.
L'impact sur la santé :
On n'entend que cela, on ne lit que cela : le coût de la santé augmente à une vitesse effarante. Les dépenses totales des Canadiens ont franchi en 2001 la barre psychologique des 100 milliards de dollars. Et bien entendu, une partie de cette augmentation est imputable aux soins exigés par une population vieillissante.
Avec l'âge, nous utilisons de plus en plus les services de santé. Avant 65 ans, la dépense publique annuelle en santé et en services sociaux était inférieure à 2000 $. À 65 ans, ce montant se chiffre à 6000 $, pour passer à 10 000 $ à 80 ans et à 16 000 $ après 85 ans. Avec un peu d'ironie, on pourrait dire qu'en atteignant son but, à savoir nous garder en vie le plus longtemps possible, la médecine crée son propre problème, car plus nous vivons longtemps, plus nous pesons lourd sur le système.
À partir de 55 ans, les hommes ont davantage recours aux services de santé que les femmes. Mais à partir de la soixantaine, le coût de la santé grimpe de façon spectaculaire pour les deux sexes.
Au Québec, par exemple, la proportion du produit intérieur brut consacrée à la santé et aux services sociaux pourrait passer de 7 % en 1998 à 15 % en 2050. Ce poids sur le système de santé ira en s'accroissant au fur et à mesure que la génération des baby-boomers deviendra, elle aussi, âgée.
Cette crise du système de santé face à une population vieillissante a été mise en évidence à plusieurs reprises, que ce soit au Québec dans le cadre de la Commission d'étude sur les services de santé et les services sociaux (commission Clair) ou, tout récemment, par le rapport intérimaire déposé par Roy Romanow, chargé d'une commission royale sur la réforme du système de santé.
Les baby-boomers sont responsables de plus de la moitié de l'augmentation des visites chez les médecins canadiens en 1999 :
Selon des chiffres de IMS HEALTH, les Canadiens âgés de 40 à 59 ans ont été responsables de 52 % des 22 millions de visites supplémentaires effectuées dans les cabinets de médecins en 1999. Ces chiffres donnent une idée du défi prévisible que pose le vieillissement de cette génération.
Des maladies les plus diagnostiquées, l'hypertension artérielle est celle qui a connu la plus forte augmentation.
Taux d'hospitalisation des personnes âgées au Canada :
Elles sont trois fois plus susceptibles d'être hospitalisées que les plus jeunes. L'hospitalisation est aussi beaucoup plus longue.
Selon des données récentes de l'Institut canadien d'information sur la santé, on constate que le secteur public assume toujours une grande majorité des dépenses de santé. Le Canada et la France se situaient, en 1998-1999, au 3e rang des pays du G-7 en ce qui concerne l'importance des ressources consacrées à la santé. Par contre, le Québec est l'une des provinces qui consacre le moins d'argent par habitant pour soigner la population. Les changements démographiques poussent le gouvernement à chercher des solutions pour un avenir qui, sinon, promet d'être difficile.
« C'est certain qu'on a des choix à faire, ce qui n'était pas le cas avant, parce que les gens mourraient. Mais c'est une question de débat de société. »- Jean Carette
Des questions d'éthique et de prévention :
Qui décidera quel montant investir pour prolonger la vie de quelqu'un de très malade, de très âgé, de quelques jours ou de quelques semaines? Si la majorité des personnes âgées peuvent demeurer autonomes et en bonne santé longtemps et ne connaître qu'une courte période de maladie à la fin de leurs jours, le système de santé pourra sans doute trouver en lui-même des solutions, d'où l'importance de la prévention des maladies.
Par exemple, chez les plus de 75 ans, les simples chutes tuent deux fois plus que les meurtres, les suicides et les accidents d'auto combinés. Souvent, ces chutes peuvent être évitées.
Les médicaments les plus prescrits aux personnes âgées :
Les analgésiques, les médicaments contre l'hypertension artérielle, les médicaments pour le cœur et l'estomac.
Cependant, il ne faut pas dramatiser :
Selon François Béland, spécialiste dans le domaine du vieillissement et des soins de santé à l'Université de Montréal, la société peut bel et bien préparer son système de santé pour qu'il puisse faire face au vieillissement de la population. Au Québec en particulier, selon l'expert, les instruments nécessaires sont déjà en place, et ce n'est en fait qu'une question de volonté, un débat public. « Nous avons 20 ans pour réagir, il n'est pas trop tard », déclare-t-il. Certes, concède M. Béland, les coûts de santé vont augmenter, mais pas de façon si faramineuse. La société peut faire face à ces coûts, si elle admet le principe de hausses d'impôts et de taxes pour répondre aux nouvelles exigences. Par ailleurs, selon M. Béland, il faut absolument dissiper le mythe qui veut que le secteur privé puisse mieux répondre que l'État aux besoins grandissants en santé. Il explique que la société finit toujours par payer la note, que ce soit en passant par des services de soins privés ou par des services publics, et que l'État est mieux à même de gérer le système. « Au bout du compte, dit-il, tout est une question de redistribution de la richesse. Les plus vulnérables, soit les plus pauvres, les plus âgés, utilisent plus les services de santé, mais les plus riches doivent accepter de financer les services utilisés par tous. »
Le spécialiste constate que le gouvernement du Québec tarde à prendre la situation en main. À la suite du rapport de la commission Clair, qui selon M. Béland mettait de l'avant des pistes de solution intéressantes, Québec ne bouge guère et attend le rapport fédéral Romanow, tout en martelant le fait que la santé relève du provincial. Parmi les pistes relevées dans le rapport Clair, M. Béland évoque la mise en place de groupes de médecine familiale, mais aussi et surtout celle de sections de réseaux intégrés destinés aux personnes âgées. Le principe : accorder un budget global à une entité chargée d'administrer toute la gamme de services destinés à cette clientèle, de l'hébergement à l'hospitalisation et aux soins à domicile, en passant par les médicaments. Selon lui, ce système serait beaucoup plus rationnel et efficace.
Un monde du travail en révolution :
Plus le nombre de personnes âgées augmente par rapport aux jeunes, moins le nombre de gens cotisants aux régimes de retraite divers est élevé. L'une des conséquences directes : il sera bientôt révolu le temps où l'on prenait sa retraite à 50, 55 ans. D'une part parce que le système n'aura pas les moyens d'assurer à tous une retraite longue et dorée, d'autre part parce qu'on aura une pénurie de main-d'œuvre et qu'il faudra garder les travailleurs déjà en place.
La Société québécoise de psychologie du travail et des organisations parlait de ce danger à l'automne 2001 en faisant porter son colloque annuel sur l'impact de l'arrivée massive à la retraite des baby-boomers. Parmi les conséquences qui se profilent à l'horizon, on retrouve le problème du manque de relève pour combler les postes laissés vacants par les nouveaux retraités. Dans une telle situation, on risque aussi de briser le lien entre les employés plus âgés et les nouveaux, et de perdre ainsi l'expérience acquise. La SQPTO constate qu'il faut de toute urgence planifier cette transition pour éviter un épisode traumatisant, comme celui du départ en masse des infirmières au sein du système de santé québécois, mais à plus grande échelle.
La fonction publique : d'ici dix ans, au Québec, plus de 40 % des employés permanents de la fonction publique provinciale auront soit pris leur retraite, soit démissionné, ou seront simplement morts. On parle ici d'une main-d'œuvre majoritairement francophone. Ces départs pourraient alors amorcer une révolution dans la composition linguistique et culturelle de la fonction publique, selon qui remplacera ces employés.
Quelques données pour la fonction publique québécoise :
- Aucun haut fonctionnaire n'a moins de 35 ans.
- La moyenne d'âge des cadres supérieurs est de 51 ans.
- La moyenne d'âge de la direction est de 52 ans.
Dans le secteur privé, on retrouve les mêmes tendances. Selon le Conseil du patronat du Québec, beaucoup d'entreprises devront remplacer jusqu'à la moitié de leur main-d'œuvre d'ici dix ans. Dans un article paru dans le quotidien Le Devoir, le président du CPQ, Gilles Taillon, explique que le déclin démographique aura un impact négatif sur la capacité de la société québécoise d'assurer sa croissance économique et sa prospérité.
Face à cette perspective, le défi des entreprises sera de fidéliser ses employés pour les garder le plus longtemps possible. On se tourne aussi vers l'importation de « sang neuf » ou de « cerveaux neufs » venus de l'étranger.
Un monde du travail moins sécurisant : la disparition graduelle de l'État-providence aura non seulement des effets sur les services sociaux et de santé, mais changera les règles sur le marché du travail. Selon la sociologue Hélène David, du groupe de recherche sur les aspects sociaux de la santé et de la prévention de l'Université de Montréal, on connaîtra ainsi une déréglementation du marché du travail avec une dérégulation des salaires et un affaiblissement de la protection au travail, ainsi qu'un alourdissement des tâches. Bref, un monde du travail plus sauvage, plus éreintant.
Dernier commentaire :
C'est dans ce monde en mouvance que je débute ma retraite. Qu'est-ce qui m'attend réellement? Je ne le sais pas. Un grand nombre d'inconnus sont devant moi. C'est le cas aussi pour tous ceux qui se voient rendus à cette période de leur vie, que l'on assimile généralement à une période de repos, de contemplation ou de réflexion et de loisirs en permanence.
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